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La dune du Pilat

La dune du Pilat est la plus haute dune d’Europe avec 103,6 mètres. Sa hauteur varie d’une année sur l’autre en fonction des vents. Elle fait partie d’un cordon dunaire littoral qui longe les côtes de la Gascogne.

La formation de la dune du Pilat

Carte du Bassin d'Arcachon par Claude Masse (1652-1737)
Carte du Bassin d’Arcachon par Claude Masse (1652-1737) © Conservatoire Patrimonial du Bassin d’Arcachon

Les Landes de Gascogne sont formées de sable poussé par le vent. Les rivières apportent une couche inférieure de sable et de graviers. Près du littoral elle atteint 100 mètres d’épaisseur. Elle se réduit au fur et à mesure que l’on avance vers l’Est.

Au-dessus, les vents d’Ouest apportent une couche de sable fin de quelques mètres. On y trouve du quartz, de la tourmaline et des grenats. Cette formation géologique s’est faite entre – 20 000 et – 10 000 ans. Elle est bien connue grâce aux études préalables aux forages pétroliers dans la région de Cazaux et de Parentis.

À marée basse, le vent arrache du sable du banc d’Argüin et le pousse vers l’est. Il rencontre des marais et une forêt de pins, de saules et de bouleaux. Une dune parabolique de 20 à 40 mètres de haut se forme. Il en existe tout le long de la côte gasconne. À leur début, on les appelle des shiula vents / siffle-vents car le vent y est fort.

À partir du XVIIe siècle, une arrivée massive de sable recouvre progressivement la dune de la Grave sous 50 mètres de sable. Elle atteint 115 mètres de haut en 1910 et prend le nom de dune du Pilat. Sa formation est récente puisqu’elle n’existait pas en 1850.

La dune du Pilat - coupe géologique © Wikimedia
La dune du Pilat – coupe géologique © Wikimedia

Toponymie

On parle tantôt de dune du Pilat ou du Pyla. La bonne appellation est celle du Pilat qui vient du gascon pilat, pialat (pile, tas, amas, monticule). On le trouve déjà sur la carte de 1708 de Claude Masse (1650-1737), géographe bordelais. Tout le secteur s’appelait los sablonèis / les sablières jusque dans les années 1930. Aujourd’hui, c’est le nom de la plage au sud de la dune.

La dune du Pilat continue de bouger. Vers l’Est, elle gagne sur le massif forestier de 1 à 5 mètres par an. Le Nord de la dune est soumis à une forte érosion en raison des vents dominants. À l’Ouest, le trait de côte se modifie selon la force des tempêtes. Au Sud enfin, elle est relativement stable.

Ce sont les vents qui lui donnent sa forme caractéristique : une pente douce de 5 à 10° côté Ouest et une pente raide de 30 à 40° vers la forêt à l’Est.

Une occupation préhistorique

On connait bien l’occupation humaine le long de la Lèira grâce aux sites funéraires.

Mais en 1982, avec le recul du trait de côte, on découvre les restes d’une occupation humaine au pied de la dune du Pilat. Cette fois, il ne s’agit pas d’un site funéraire mais des traces d’un campement. Outre des charbons de bois, on trouve des vases et des augets brisés qui servent à l’exploitation du sel (l’eau de mer est chauffée dans ces récipients pour en extraire le sel). Ils sont caractéristiques de l’âge du fer.

Chantier de fouilles archéologiques, 2014
Chantier de fouilles archéologiques du Pilat, 2014 © Wikimedia

En 2013, on trouve une urne funéraire et un vase de l’âge du bronze (vers 800 avant J.C.). Des fouilles sont entreprises en 2014 sur une plus large surface. On trouve des trous de poteaux régulièrement disposés qui soutiennent un toit d’habitation et des tessons de céramique. On trouve aussi l’urne funéraire d’une personne âgée de 30 ans. C’est la preuve d’un habitat avant la formation de la dune du Pilat. À proximité se trouve une très grande quantité de coquilles d’huitres, ce qui tend à démontrer qu’on en faisait le commerce.

En 2018, une autre opération de fouilles est organisée au nord de la dune du Pilat. Un nouveau site d’extraction de sel est découvert. Des trous de poteaux permettent d’identifier une habitation de 10 mètres de long sur 5 de large, dans laquelle on a trouvé un fragment de meule et d’un four. L’habitation est composée de trois pièces.

La preuve est faite que la dune du Pilat s’est formée tardivement et que le trait de côte recule avec l’avancée de la dune à l’intérieur des terres.

La dune du Pilat est un lieu vivant

Oyats © J-P Bellon
Oyats sur la dune du Pilat © J-P Bellon

La dune du Pilat est faite de sable qui avance de 1 à 5 mètres par an et grignote la forêt. C’est un milieu inhospitalier. Pourtant, à y regarder de plus près, elle abrite une flore et une faune d’une très grande richesse, parfaitement adaptées aux conditions difficiles de vie sur la dune.

Tout d’abord, au pied de la dune, des sources d’eau douce abritent des iris jaunes, des roseaux et des saules. Plus haut, on trouve le gorbet (oyat) dont les racines s’infiltrent profondément dans le sable à la recherche de la moindre goutte d’eau. Ses feuilles s’enroulent sur elles-mêmes pour résister à la chaleur et abritent du vent d’autres plantes qui poussent à côté. Son utilisation ralentit la progression des dunes depuis le XVIIIe siècle.

On trouve aussi la Linaire à feuilles de thym qui est endémique, le Panicaut maritime aux fleurs bleues métal en forte régression en raison de la sur fréquentation du site, l’Immortelle des dunes qui dégage une forte odeur d’épices quand il fait chaud, l’Armoise de Lloyd qui forme des buissons fleuris de jaune.

Immortelle des dunes
Immortelle des dunes © Wikimedia

La faune est abondante sur la dune, pour peu que l’on prenne le temps de l’observer. Le lézard à deux raies est l’un des plus grands de France puisqu’il mesure 40 cm de long. La femelle porte deux lignes blanches de chaque côté du dos. La couleuvre helvétique qui sort le jour pour chasser et dont on peut voir les traces de son passage sur le sable de la dune du Pilat.

Ajoncs, genêts, arbousiers résistants au feu, chênes pédonculés, pins maritimes, gravelots à collier qui nichent dans le sable, lièvres ou huitriers-pie se partagent la dune du Pilat. Les touristes les dérangent trop souvent.

Surfréquentation touristique

Escalier d'accès à la dune du Pilat
Escalier d’accès à la dune du Pilat © Wikimedia

C’est en 1915 que l’intérêt touristique pour la dune du Pilat prend son essor avec la construction d’un lotissement pour clients fortunés. On construit même sur les flancs de la dune, en oubliant qu’elle est en mouvement. En 1943, on interdit les constructions nouvelles  mais les aménagements touristiques reprennent en 1950 avec la construction de quatre campings. Les classements de protection du site interrompent définitivement ce processus à partir de 1975.

La dune du Pilat reçoit plus de 2 millions de touristes chaque année. Elle est le deuxième site le plus visité après le Mont Saint-Michel.

Cette surfréquentation n’est pas sans effet sur la pérennité du site, sa flore et sa faune. Et les retombées économiques sont importantes pour le bassin d’Arcachon. Il faut allier tourisme et protection de la dune du Pilat. C’est le rôle du Syndicat Mixte de la Grande Dune du Pilat.

Le Syndicat mixte

Le Syndicat mixte de la dune du Pilat créé en 2007 associe la Région Nouvelle Aquitaine, le Département de la Gironde et la Teste de Buch. Il a pour mission de protéger et de valoriser le site de la dune du Pilat qui appartient au Conservatoire du Littoral.

Camping de la dune du Pilat après les incendies de 2022
Camping de la dune du Pilat après les incendies de 2022 © Le Monde

Aménagement d’un village d’accueil, amélioration du stationnement pour supprimer le stationnement sauvage (370 000 véhicules payants reçus en 2019), mise en place du service de collecte des déchets (6 tonnes collectées sur le village d’accueil), régulation des activités de loisirs (vol libre, notamment), protection de la faune et de la flore et lutte contre les espèces envahissantes (12 espèces recensées), lutte contre l’érosion, etc.

Comme on le voit, le travail entrepris est de longue haleine. Les résultats sont tangibles. Malheureusement, le grand incendie de l’été 2022 a ravagé les abords de la dune du Pilat, bru les cinq campings situés au pied de la dune et ruiné la saison touristique.

À toute chose, malheur est bon. L’incendie est devenu un accélérateur de l’aménagement du site de la dune du Pilat pour contrôler le flux touristique et améliorer la protection du site.

Tout finit par des chansons

En 1912, Léonce Laforgue compose Vers le Port, une chanson sur Arcachon sur les paroles de J-B Ayraud. En voici le deuxième couplet :

Regardons loin de nous, près de ces dunes blanches,
Sur le sable brulant nos barques vont mouiller ;
Et là près du grand banc, malgré qu’il soit dimanche,
Des milliers de parqueurs viennent y travailler.
Plus loin vers le Pilat, une immortelle plage,
Les brisants, les grands pins et la pointe du sud,
L’écume de la mer sur ce joli rivade,
Le phare, les chalets, la Vierge du Salut.

Serge Clos-Versaille

écrit en orthographe nouvelle

Références

La dune du Pilat (Wikipedia)
Syndicat Mixte de la dune du Pilat
Tourisme Gironde
Bassin d’Arcachon (Wikipedia)
Claude Masse(Ingénieur) (Wikipedia)
Conservatoire Patrimonial du Bassin d’Arcachon

 

 

Vue panoramiqque de la dune du Pilat © Wikimedia
Vue panoramique de la dune du Pilat © Wikimedia




Aristide Bergès, un progressiste

Le Coseranés Aristide Bergès est le pionnier de l’hydroélectricité. Brillantissime, il est à l’origine d’une révolution.

La famille Bergès et ses racines couseranaises

Pierre Bergès, le père d'Aristide
Pierre Bergès (1800-1891), le père d’Aristide

La famille Bergès vit dans le Coserans (Couserans) dans la région de Sent Líser (Saint-Lizier). Ce sont des artisans : maçons, tailleurs de pierre, charpentiers, meuniers… L’un d’eux, Bertrand Bergès suit une formation de compagnon papetier à Sarrancolin (Hautes-Pyrénées).

À la Révolution, les biens des nobles deviennent propriété nationale. Alors, les deux frères Laurent et Bertrand Bergès achètent un des moulins de Lòrp (Lorp) qui appartenait à la baronne de Taurignan Pointis. Ce moulin passera au fils de Bertrand, Pierre Bergès. Puis, le 23 juillet 1827, Pierre épouse Jeanne Marie Victoire Foch, fille d’un fabricant de papier de Sent Líser. Ils auront 8 enfants dont 4 mourront en bas-âge. Mais Pierre est cultivé et veut instruire ses fils : Aristide, Étienne-Bertrand, Achille, Philippe. Aussi il prend un précepteur à domicile.

Pierre Bergès, le père papetier

La famille est ouverte, moderne, progressiste. Elle est à l’écoute de son temps. Ainsi, Pierre Bergès s’équipe d’une machine à papier, une invention de Louis-Nicolas Robert (1761-1828). Cette machine économise de la main d’œuvre et surtout permet non plus de sortir des feuilles une à une mais de faire un large et long ruban de papier. Son principe consiste à verser de la pâte à papier dans une grande cuve, puis une roue à écopes la déverse sur une toile métallique sans fin, en rotation et en vibration permanente, ce qui permet l’égouttage de la pâte. La feuille qui se forme ainsi est pressée entre des cylindres de presse garnis de feutres, puis s’enroule sur des bobines installées au bout de la machine. Plus tard, en 1848, Pierre achète une deuxième machine entrainée par trois turbines hydrauliques de type Fourneyron. C’est novateur et bien plus efficace que les roues à eau.

Maison natale d'Aristide Bergès et ancienne papeterie de Prat du Ritou à Saint-Lizier (09)
Maison familiale d’Aristide Bergès et ancienne papeterie de Prat du Ritou à Saint-Lizier (09)

Aristide Bergès, le fils ingénieur

Premiers locaux de l'Ecole Centrale à l'Hôtel de Juigné (aujourd'hui musée Picasso)
1ers locaux de l’École Centrale à l’Hôtel de Juigné (aujourd’hui musée Picasso)

Revenons au fils, Laurent, Arnaud, Aristide, Marcellin Bergès qui nait le à Lòrp (Lorp) dans le Coserans (Couserans). Après l’éducation primaire à la maison, Aristide continue sa scolarité au pensionnat Saint-Joseph à Tolosa (Toulouse). Il est très brillant et, avec les encouragements de ses professeurs, il passe l’examen d’entrée à l’École Centrale des Arts et Manufactures (créée en 1829), aujourd’hui l’École Centrale de Paris. Sa plus mauvaise note sera un 18 à un oral de mathématiques.

Aristide est le benjamin de l’école, il a tout juste 16 ans quand il y entre. Il est timide, a l’accent gascon et se sent bien petit à côté de ses camarades de familles aisées. Si ses camarades sortent très souvent, lui ne peut se payer qu’une place de parterre dans un petit théâtre une fois par mois. Dès lors, il restera sensible aux différences sociales. Cependant, Aristide obtient son diplôme en 1853. Seuls 46 des 134 élèves du début du parcours l’obtiennent. Et il sort deuxième. Il a choisi la spécialisation chimie en vue de la reprise de la papeterie familiale.

Des débuts difficiles pour Aristide

Aristide Bergès
Aristide Bergès

Ayant fini ses études, Aristide travaille à la Compagnie des chemins de fer de l’Ouest nouvellement créée. Puis, en 1856, un de ses camarades de Centrale lui propose une association pour reprendre une usine de toiles imperméables à Caudéran, à côté de Bordeaux. Aristide démissionne, mais son père refuse de lui avancer l’argent et rencontre l’industriel vendeur. Par ses propos, il humilie son fils. Toutefois, le vendeur accepte d’aider financièrement les deux jeunes repreneurs.

Cette même année, Aristide rencontre la Toulousaine Jeanne Marie Raymonde Cardailhac, tailleuse de robes. Encore une fois, le père s’interpose et refuse cette union, la jeune femme est pauvre et a 9 ans de plus que son fils. Alors, les jeunes amoureux fuient à Londres pour se marier le 27 septembre 1856.  Pour survivre, Aristide est contraint de trouver un poste. Ce sera à Cordoue, à la Compagnie des chemins de fer de Séville. Mais il a des dettes et n’est toujours pas majeur. Son père envoie une lettre aux dirigeants à Séville pour déclarer que son fils n’est pas marié.

Aristide est contraint de démissionner. Le couple rentre à Toulouse. Enfin majeur (à 25 ans), il obtient du tribunal la mainlevée de l’opposition de ses parents. Il peut signer le contrat de mariage devant notaire le 6 avril 1859 et se marier à la mairie de Toulouse. Le tribunal oblige même ses parents à lui verser une pension alimentaire. Les relations avec son père s’apaiseront peu à peu.

Les débuts de l’ingénieur Aristide Bergès

En 1860, Aristide entre à la Compagnie générale des asphaltes probablement grâce à des camarades de Centrale. L’année suivante, le père consent enfin à aider son fils à la condition expresse qu’il renonce à jamais à l’utilité du jugement rendu par le tribunal civil de Saint-Girons. En effet, ce jugement entache l’honneur de Pierre Bergès et provoque même des rumeurs sur sa solvabilité.

Le défibreur de Bergès installé à Lorp en 1862
Le défibreur de Bergès installé à Lorp en 1862

Aristide s’installe à Maseras de Salat (Mazères-sur-Salat). Là, il construit une râperie de bois qu’il a mise au point. Une fois l’écorce enlevée, la machine râpe les troncs et libère les fibres du bois. Elles feront la pâte à papier.

Or, les papetiers Amable Matussière (1829-1901) et Gabriel Fredet (1829-1904) sont deux camarades centraliens de notre Aristide, à peine plus âgés. Ils veulent mettre en place une râperie dans l’usine d’Amable à Domène dans l’Isère. Et ils font appel à lui en 1867.

La papeterie du Lancey au début du 20e siècle. On voir les canalisations forcées qui descendent de la Cimbe de Lancey
La papeterie du Lancey au début du 20e siècle. On voit les canalisations forcées qui descendent de la Combe de Lancey

Grâce à Amable, Aristide s’installe à Villard-Bonnot dans l’Isère, au bord du ruisseau de La Combe de Lancey. Là, notre ingénieur crée en 1869 la première conduite forcée en captant une chute de 200 mètres. Elle alimente une turbine permettant d’entrainer les défibreurs de sa râperie de bois. C’est un véritable exploit ! Les débits et la pression de l’eau étaient tels qu’il fallut trouver des matériaux aptes à supporter ces pressions et renforcer les soudures des canalisations.

Aristide Bergès, l’inventeur

La conduite forcée de Bergès
La conduite forcée de Bergès

En fait, dès sa sortie de Centrale, Aristide Bergès témoigne de son inventivité et dépose de nombreux brevets. Par exemple, il crée un appareil rotatif à haute pression pour broyer les roches et en extraire le bitume. il invente la pilonneuse mécanique à vapeur employée à l’asphaltage du terre plain de l’Arc de Triomphe.

Pour le métier de papetier, il dépose aussi de nombreux brevets qui seront des perfectionnements majeurs et durables : recyclage sans fin de la pâte à papier, décantation de la pâte, hélice pour les cuves, pompe spirale pour la recirculation,  serrage hydraulique…

Mais, il marquera surtout son temps par son concept de… la houille blanche.

L’inventeur de la houille blanche

À partir de 1880, l’usine d’Aristide s’agrandit de façon spectaculaire. Aussi, il ajoute une autre conduite forcée, cette fois-ci de 500 mètres, pour monter une papeterie à côté de sa râperie. Mais il n’utilise qu’une partie de l’énergie produite. Alors, il installe une dynamo qui fournit de l’électricité avec la force de la chute d’eau.

Le Lac du Crouzet (1974m)
Le Lac du Crouzet (1974m)

En 1889, Aristide Bergès présente son invention de production électrique à partir de l’eau à l’Exposition universelle de Paris en l’appelant la houille blanche (en allusion à la houille noire, le charbon). Aristide Bergès déclare : les glaciers ne sont plus des glaciers ; c’est la mine de la houille blanche à laquelle on puise, et combien préférable à l’autre [houille noire].

Mais l’irrégularité du débit est dangereuse et nuit à l’installation. Aussi, pour soutenir le débit du torrent, il bâtit en 1892 un barrage sur le lac du Crozet et un siphon à 6 m sous la surface de l’eau. C’est un succès considérable, même si cela lui vaut des procès avec les locaux. Il installe un tramway électrique pour le transport du bois. Et l’énergie hydraulique s’étend à toutes les Alpes du Nord.

Rapidement, les pouvoirs publics réagissent et créent le Service des forces hydrauliques au sein de l’administration des Ponts et Chaussées.

Progrès technique et social

Pour Aristide Bergès, le progrès technique est au service du progrès social. Le papier moins cher, c’est pour lui le livre bon marché, l’instruction à portée de toutes les bourses. De même, il fait installer l’électricité dans les maisons du hameau de Lancey et pousse la municipalité de Grenoble à mettre en place un éclairage public. D’ailleurs, il crée en 1898 la Société d’Éclairage Électrique de Grésivaudan, pour amener le courant à Grenoble et ses environs. C’est autour de la lampe électrique que le soir commencent le repos et la vie de la famille, pour le pauvre comme pour le riche, écrit-il. De plus, pour lui, l’énergie chez soi permet de créer des petits ateliers à domicile.

Il organise aussi des équipements et des services pour les ouvriers de son usine et leurs familles : cité ouvrière, infirmerie, crèche… Lors de sa création, le syndicat des ouvriers papetiers de Lancey rappellera « la part qu’il a prise dans l’émancipation ouvrière ».

Aristide Bergès meurt le 28 février 1904. Il est enterré à Toulouse, avec sa femme Marie Cardailhac. Après un enfant mort-né en début de mariage, ils ont eu cinq enfants dont trois, Achille, Georges et Maurice reprendront les papeteries de Lancey.

Les retombées de la houille blanche

L'institut électrotechnique de Grenoble 1901) vue extérieure lors de sa fondation Rue Général-Marchand, Annexe du Lycée de Jeunes Filles
L’Institut Électrotechnique de Grenoble, vue extérieure lors de sa fondation en 1901, rue Général-Marchand, annexe du Lycée de Jeunes Filles

La houille blanche va donner un élan à la région grenobloise qui se fera connaitre pour ses inventeurs, ses avancées sociales et ses premières écoles d’ingénieurs (début XXe siècle). En effet, pour répondre à cette industrialisation naissante, il faut spécialiser la formation. Après des premiers cours d’électricité, se crée l’Institut Électrotechnique de Grenoble en 1901.

Aujourd’hui, les 32 barrages des Alpes produisent 15 % de la production française d’électricité.

Un lycée et un bâtiment de l’Ense3 (École nationale supérieure de l’énergie, l’eau et l’environnement) portent son nom. La maison Bergès à Villard-Bonnot devient le musée de la Houille BlancheAristide Bergès avait la faculté de prendre des risques et le sens de la communication, indique Cécile Gouy-Gilbert, conservateur du Musée de la houille blanche.

Le Musée de la Houille Blanche aménagé dans la maison familiale d'A. Bergès à Villard-Bonnot (Isère)
Le Musée de la Houille Blanche aménagé dans la maison familiale d’A. Bergès à Villard-Bonnot (Isère)

Enfin, dans sa ville natale de Lòrp e Senta Aralha (Lorp Sentaraille), l’ancienne papeterie familiale et la maison adjacente sont devenues le musée Aristide Bergès.

Anne-Pierre Darrées

écrit en orthographe nouvelle

Références

Histoire industrielle, Aristide Bergès, une vie d’innovateur, Louis André, 2013.
Histoire des papeteries de Lancey, de Bergès à nos jours, Gilbert Coffano, 1999.
Les papeteries de Lancey.
Les grands Centraux, Aristide Bergès, promotion 1852.
Aristide Bergès, inventeur ariégeois, François Baby, 1987.




Simin Palay

Simin Palay, de son vrai nom Maximin Palay, est un auteur prolifique. Il aborde tous les genres littéraires : poésies, romans, théâtre, lexicographie, chroniques, livre de cuisine. Il reste cependant relativement méconnu.

Une enfance bercée par l’écriture et par le gascon

Simin Palay en 1909
Simin Palay en 1909 (35 ans)

Simin Palay (1874-1965) nait à Castèida (Castéide-Doat), petit village béarnais à quelques kilomètres de Vic de Bigòrra (Vic en Bigorre).

Son père Yan fréquente l’école jusqu’à 12 ans, puis devient tailleur d’habits et agriculteur. Tout d’abord, il écrit des chants patriotiques et des pastourelles en français avant de se tourner vers le gascon, sa langue maternelle. Ses 22 contes en vers gascons parus en 1907, les Coundes biarnés / Condes biarnès / Contes béarnais, sont un succès.

Déjà, le grand-père de Simin Palay écrit des poèmes en français et en gascon. Malheureusement, aucun ne nous est parvenu, sans doute perdus dans les nombreux déménagements de la famille.

En 1888, la famille Palay s’installe à Vic en Bigorre où le père tient une boutique de tailleur. L’atelier devient rapidement le centre de rencontre des intellectuels et des artistes locaux. Parmi eux, on citera Norbert Rosapelly, Xavier de Cardaillac, le poète Cyprien Dulor, le sculpteur Edmond Desca, le peintre Lestrade, etc.

Lous coundes lous mey beroys de Yan Palay (edition de 1948)
Lous coundes lous mey beroys, Yan Palay, édition de 1948

À leur contact, Simin Palay découvre les grands poètes du moment. Il dira : Magnifique époque, en vérité, que celle où l’on pouvait lire chaque jour des œuvres nouvelles de Verlaine, de Mallarmé, de José-Maria de Heredia.

Et lui-même, malgré son jeune âge, écrit des poèmes en français. Bien sûr, il connait les œuvres en occitan des poètes ouvriers que lit son père comme Jasmin, Reboul ou Théodore Blanc. Mais c’est à l’âge de 16 ans qu’il découvre vraiment la littérature d’oc et fait la rencontre de Miquèu de Camelat, le fils du cordonnier d’Arrens (Arrens-Marsous). De cette rencontre naitra une longue amitié.

La Félibrée de Tarbes de 1890

Miqueu de Camelat
Miqueu de Camelat

Les Cigaliers de Paris, une association félibréenne, sont en voyage dans le sud-ouest. Simin Palay dira : ce magnifique pèlerinage en Gascogne d’où ressortirait le renouveau littéraire qui a fait jaillir en Languedoc et en Gascogne une foule de talents voués probablement à la nuit totale si l’occasion ne leur eût été donnée, alors, de se découvrir eux-mêmes. Rappelons que le félibrige est un mouvement de défense et de promotion des langues régionales.

En aout, les Cigaliers sont à Tarbes où une Félibrée est organisée. Yan Palay est primé pour le conte Lou curè dé Cérou è casaüsus / Lo curè de Seron e Casausus / Le curé de Séron et Casausus. Miquèu Camelat est aussi primé pour son poème En Grounh tiré d’une légende du val d’Azun.

Pour Simin Palay qui a tout juste 16 ans, c’est une révélation. Il dit : Je fis à cette occasion la connaissance – spirituelle – des grands félibres dont j’ignorais jusque-là les noms et les œuvres : Mireille, La Miugrano entreduberto, Lous cants dou soulel, etc. De plus, la prestation de Miquèu de Camelat l’impressionne. L’année suivante, Simin Palay passe à Arrens. Il rencontre Camelat. Que’s pot dise qu’aquet die lo yermi de l’Escole Gastoû Febus qu’ère semiat. / Que’s pòt díser qu’aqueth dia lo germi de l’Escòla Gaston Febus qu’era semiat. / On peut dire que ce jour-là le germe de l’Escòla Gaston Febus était semé.

Simin Palay et Miquèu de Camelat, fondateurs du Félibrige gascon

1er numéro de Reclams (février 1897) - Auteurs : Isidore Salle, Camélat Yan Palay, Simin Palay, J-V Lalanne, etc.
Reclams de Biarn e Gascounhe n° 1 de février 1897, auteurs : I. Salle, M. Camélat,  Yan Palay, Simin Palay, J-V. Lalanne, etc.

En 1893, parait l’Armanac patouès dé la Bigorro qui reçoit un excellent accueil. L’année suivante, il prend le titre d’Armanac Gascou – Bigorre – Béarn –  Armagnac – Lanes. En même temps, ils lancent un concours littéraire dont le succès a surpris même ses auteurs !

Simin Palay et Miquèu de Camelat veulent fonder un groupement félibréen. C’est chose faite en 1895. Mais Simin Palay ne figure pas parmi les sept signataires car il fait son service militaire et ne peut être membre d’une assosication. L’année suivante, le groupement devient l’Escole Gastoû Fébus. Puis, le 1er février 1897, parait le premier numéro de la revue Reclams de Biarn e Gascougne. Elle existe encore aujourd’hui sous le titre de Reclams. Et c’est la plus ancienne revue littéraire.

Pourtant, tous les poètes gascons n’adhèrent pas. Certaines personnes réfrènent même l’enthousiasme des fondateurs. Pour eux, la revue fait une part trop belle au français. Et ses abonnés sont surtout des notables. Tout cela va conduire à une crise interne en 1909.

La naissance de La Bouts de la Terre

Simin Palay, qui réside à Gélos depuis 1902, fonde, avec Miquèu de Camelat, le journal La Bouts de la Terre (….) qui s’adresse à toute la population. C’est le journalét qui clame dus cops per més / jornalet qui clama dus còps per mes / le petit journal qui parait deux fois par mois. Très vite, les jeunes auteurs gascons rejoignent le journal. Le dernier numéro parait le 1er septembre 1914 et ne sera pas relancé après l’Armistice. Pour autant, Simin Palay n’a pas coupé les ponts avec la revue Reclams dans laquelle il écrit encore quelques articles.

i 1914- un des derniers numéros
La Bouts de la Terre de mai 1914, une des dernières parutions

Puis, Simin Palay est élu Majoral en 1920 (un des 50 qui composent le consistoire, gardien de la philosophie du mouvement). Dès lors, il participera activement au Félibrige. Peu après, en 1923, il devient Capdau de l’Escole Gastoû Fébus (président) et le reste jusqu’à sa mort en 1965. Son ami Miquèu de Camélat en sera le Secrétaire jusqu’en 1962.

Simin Palay, 75 ans d’écriture

Revue régionaliste des Pyrénées Mars-Avril 1919, en V, article de S. Palay : « Le paysan béarnais »

Simin Palay est un grand chroniqueur en gascon. La majorité de ses articles et chroniques paraissent dans la revue Reclams et dans le journal La Bouts de la Terre.

Il écrit aussi régulièrement dans des journaux en français qui laissent une place au gascon comme Le Patriote des Pyrénées de Pau. C’est d’ailleurs pour devenir collaborateur de ce journal quotidien que Simin Palay quitte Vic en Bigorre en 1902.

Il écrit encore, en français cette fois-ci, dans La revue régionaliste des Pyrénées dont il est l’un des fondateurs en 1917. Naturellement, il y publie aussi quelques poèmes en gascon.

 

 

 

La cuisine du pays de Simin Palay
La cuisine du pays, Simin Palay

En 1921, Simin Palay publie un livre qui sera le plus connu de ses ouvrages : La cuisine du pays. Il contient 600 recettes et tout un tas de proverbes béarnais. Ce best seller connaitra plus de 11 rééditions et continue à être édité par les Editions Marrimpoey

Enfin, comme de nombreux Félibres, Simin Palay publie ses mémoires en 1961 dans Petite Bite e bite bitante et Memori e Raconte. Volontairement, il se limite à la période de sa jeunesse, de 1874 à 1888. Outre ses souvenirs personnels, il décrit la société paysanne de son village de Castèida. Ainsi, c’est un témoignage incomparable de la vie rurale à cette époque.

Le poète et le dramaturge

Simin Palay - "Praube Caddetou"
Praube Caddetou, Simin Palay

Simin Palay est un poète assez méconnu. Pourtant, il publie plusieurs recueils, notamment : Bercets dé Youénèsse è Coundes enta rise / Versets de jeunesse et contes pour rire en 1899, Sounets e Quatourzis / Sonnets et Quatorzains en 1902, Las Pregàries e las Gràcies / Les Prières et les Grâces en 1926. En 1909, il publie même un poème épique de 828 vers sur la guerre des Albigeois, primé aux Jeux Floraux de Toulouse.

Simin Palay est aussi l’auteur de 80 pièces de théâtre. La plus célèbre est Lou Franchiman / Le Français publiée en 1896 qui fera plus de 1 000 représentations jusqu’en 1944. La Peleye dous Arrasims / La dispute des Raisins, publiée en 1901, est une pièce pour les jeunes, jouée par des jeunes. Pansard e Lamagrere sort en 1919, Caddetoû en 1922, Lou marcat de la Trouje / Le marché de la Truie en 1927, Lou terrible medeci / Le terrible médecin en 1934, Lou Biadje de Cauterés / Lo voyage de Cauterets en 1949, …

L’œuvre majeure de Simin Palay, le Dictionnaire

Le Dictionnaire du Béarnais et du Gascon modernes - Edicions Reclams 2020
Le Dictionnaire du Béarnais et du Gascon modernes, Simin Palay,  Edicions Reclams 2020

Le Dictionnaire du Béarnais et du Gascon modernes est l’œuvre majeure de Simin Palay. 

En fait, dès 1887, Vastin Lespy publie un dictionnaire de béarnais ancien et moderne. Cénac-Montaut en fait autant pour le Gers. Puis Fernand Sarran toujours pour le Gers. Le dictionnaire de Sarran ne sera pas publié à cause du décès de l’auteur mais sera utilisé pour enrichir le « Palay ». Moureau pour le pays de Buch. Des lexiques des Landes, du val d’Azun ou du Médoc paraissent également. Aucun ouvrage ne regroupe les parlers de la Gascogne.

Si l’Escòla Gaston Febus a l’idée de ce dictionnaire, la réalisation est difficile. Elle met en place une commission du dictionnaire dès 1902, mais, faute de méthode et de direction, il n’avance pas. Finalement, c’est Simin Palay qui le dirigera et permettra sa réalisation trente ans plus tard.

Ainsi, l’Escòla Gaston Febus le publie en 1932 (tome 1) et 1934 (tome 2), puis le CNRS en 1961, 1974, 1980 et 1992. Enfin, de nouveau l’Escòla Gaston Febus – Edicions Reclams le publie en 2020 avec l’aide de Lo Congrès permanent de la lenga occitana. C’est sans conteste l’ouvrage le plus connu et le plus utilisé par les étudiants, les enseignants et les chercheurs.

Ce qu’en a dit le poète Tristan Derème

Tristan Derème (1889-1941)

C’est une mine, et n’est-ce pas un divertissement charmant que de feuilleter de la sorte une collection de mots qui ne sont point pareils à des papillons morts sous une vitrine, mais au contraire, qui demeurent bien vivants et battent des ailes, dès que nous nous prenons à les considérer. Ils volent de-ci, de-là, et si nous nous abandonnons à les suivre, nous pénétrons avec eux en une province aux belles montagnes blanches et bleues et dont les torrents chantent sous les noisetiers, cependant que nous entendons sonner non pas un langage méprisable, mais une langue, sœur de la nôtre.

Les Français ont leur Larousse, les Gascons ont leur Palay !

Serge Clos-Versaille

écrit en orthographe nouvelle

Références

Simin Palay (1874-1965) par Jean-Pierre BIRABENT, coédition du Cercle Occitan de Tarba et des éditions du Val d’Adour, 2010.
Ensag de bibliografia de las obras editadas de Simin Palay, Reclams,  François Pic, 2004.
Bibliothèque de l’Escòla Gaston Febus
Le dictionnaire de Palay enfin réédité, Escòla Gaston Febus, 2019
La bouts de la tèrre – Une tentative de presse régionaliste en Béarn au début du siècle, David Grosclaude, Editions Per Noste.
La Bouts de la terre d’Armagnac Biarn, Bigorre e Lanes, Bibliothèque Escòla Gaston Febus (collection avec quelques lacunes).




Bayonne, la capitale du chocolat est gasconne

Le chocolat vient d’Amérique. Aztèques et Mayas boivent le Xocolatl qui donne chocolate en espagnol. Portugais et Espagnols en font le commerce. Et bientôt, Bayonne devient la capitale du chocolat en Europe.

Le chocolat arrive à Bayonne

Décret d'expulsion des Juifs d'Espagne
Décret d’expulsion des Juifs d’Espagne du 31 juillet 1492 © Wikipedia

C’est aux vicissitudes de l’histoire que l’on doit l’arrivée du chocolat à Bayonne.

Ferdinand d’Aragon et Isabelle la Catholique, sous la pression de l’Inquisition, expulsent les Juifs d’Espagne par le décret de l’Alhambra du 31 juillet 1492. Alors, la plupart d’entre eux se réfugient au Portugal tout proche. Mais, à cause de son puissant voisin, le Portugal expulse à son tour les juifs en 1496 ou les oblige à se convertir au catholicisme.

Si certains émigrent en Italie, en Afrique du nord, dans l’empire ottoman ou en Hollande (dont la famille du philosophe Spinoza), quelques-uns sont accueillis à Bayonne et dans les communautés voisines (Came, Saint-Jean Pied de Port, Saint-Martin de Seignanx, etc.). C’est Henri IV et le duc de Gramont, alors gouverneur de Bayonne, qui facilitent leur arrivée à partir de 1602.

Parmi la « nation portugaise » (c’est ainsi qu’on appelle les Juifs d’Espagne et du Portugal), il y a de nombreux commerçants qui maitrisent l’approvisionnement et la transformation des fèves de cacao. On les appelle les faiseurs de chocolat.

La journée, les faiseurs de chocolat travaillent chez des épiciers de Bayonne qui revendent le chocolat dans leur boutique. Ils vont même chez des particuliers pour préparer directement cette boisson de luxe aux réputations médicinales et aphrodisiaques. Le soir venu, ils quittent Bayonne pour regagner Saint-Esprit.

Conflit avec la Guilde des marchands de Bayonne

Au XVIIIe siècle, le chocolat représente une importante source de revenus pour Bayonne. En conséquence, des rivalités commerciales apparaissent.

Le mariage de Louis XIV à Saint-Jean-de-Luz
Le mariage de Louis XIV à Saint-Jean-de-Luz @ Wikipedia

Il faut dire que c’est un produit de luxe que Marie-Thérèse d’Autriche, fille du roi d’Espagne et femme de Louis XIV, ramène à la Cour de France. En effet, elle le fait découvrir à Louis XIV lors de son mariage en 1660 à Saint-Jean-de-Luz.

Déjà, en 1659, David Chaillou (1628-1687), un Toulousain qui a du nez, obtient de Louis XIV le monopole de la vente du chocolat à boire en France pour 29 ans. Il ouvre une boutique à Paris et est à l’origine de la « folie du chocolat ».

Le Corps de Ville en offre aux personnalités de passage à Bayonne. Par exemple, en 1680, Vauban qui vient inspecter les fortifications se voit offrir 16 livres de chocolat !

Synagogue actuelle de Bayonne
Synagogue actuelle de Bayonne-Saint-Esprit

Mais, en 1725, les échevins de Bayonne publient une ordonnance interdisant aux juifs de Saint-Esprit de venir à Bayonne pour fabriquer du chocolat. Abraham d’Andrade est condamné pour avoir loué un appartement dans Bayonne pour y fabriquer du chocolat.

La guerre économique continue. En 1761, les chocolatiers de Bayonne créent une corporation afin d’assoir leur monopole et empêcher les juifs d’exercer la profession de chocolatier. Les statuts prévoient qu’il faut être catholique pour appartenir à la corporation et obtenir le droit d’exercer. La manœuvre est claire.

Mais, suite aux plaintes des marchands de Saint-Esprit, le Parlement de Bordeaux supprime la corporation en 1767. Il faut dire qu’ils sont aidés par le Duc de Gramont qui possède la plupart des maisons des commerçants juifs de Saint-Esprit.

Graines de chocolat

Le développement de la fabrication du chocolat

La première chocolaterie française voir le jour en 1770. Dix ans plus tard, la première usine à chocolat mécanique ouvre à Bayonne.

Chocolaterie Mugica - Bayonne - 1905:1960
Chocolaterie Mugica – Bayonne (1905-1960) © chocolatdebayonne.fr

Petit à petit, la consommation de chocolat se démocratise. En plus de la boisson, on fabrique des bonbons, de la pâtisserie ou des glaces avec le chocolat. Bayonne est la ville du chocolat et la qualité de ses produits est appréciée. Elle fabrique un chocolat particulier, à plus de 70 % de fèves de cacao d’Équateur, très rare à l’époque.

La demande est forte. Le chocolat s’exporte partout en Europe. Dès 1825, des fabriques existent à Biarritz, Cambo, Charritte, Espelette, Hasparren, La Bastide-Clairance, Saint-Etienne de Baïgorri, Saint-Jean Pied de Port, Saint-Palais et Ustaritz.

En 1854, il y a 32 fabricants de chocolat à Bayonne.

Pourtant, la fabrication industrielle du chocolat au XXe siècle relègue Bayonne au second plan. En 1945, il ne reste que 15 chocolatiers.

Quelques grandes maisons de chocolat existent encore à Bayonne. La maison Cazenave est fondée en 1854, la maison Daranatz en 1890, la maison Pariès en 1895. De jeunes chocolatiers perpétuent la tradition, comme L’Atelier du chocolat fondé en 1951, ou la maison Pascal fondée en 2008.

Chocolatiers de Bayonne
Chocolatiers de Bayonne

La consommation de chocolat

Les Français aiment le chocolat. Ils en consomment 7 Kg par personne chaque année, surtout du chocolat noir (la moitié des ventes de tablettes).

Aujourd’hui, 70 % du chocolat se vend en grandes surfaces. Il occupe 105 entreprises, dont 90 % sont des entreprises artisanales qui font travailler environ 30 000 personnes.

Les ventes se font essentiellement sous forme de tablettes (38 %), suivies des pâtes à tartiner (25 %), des barres chocolatées (14 %), des confiseries (13 %) et de poudre de chocolat pour le petit déjeuner (10 %).

En 2021, la France exporte 243 585 tonnes de chocolat, soit 70 % de sa production. Nous mangeons le reste ! L’Union européenne en absorbe 81 %.

Comme disent les Gascons, le chocolat qu’ei bon a se’n lecar los poths / il est bon à s’en lécher les babines !

Le chocolat, de multiples manières de le consommer !

La promotion du chocolat de Bayonne

Les Journées du Chocolat de l'Académie du Chocolat (Ascension)
Les Journées du Chocolat de l’Académie du Chocolat à l’Ascension

Pour promouvoir le savoir-faire des chocolatiers de Bayonne, l’Académie du Chocolat est créée en 1993.

Elle regroupe les principaux chocolatiers qui s’engagent à travailler selon des critères rigoureux de fabrication, à utiliser des matières nobles et à respecter la tradition du chocolat noir et amer.

L’Académie organise chaque année, à l’Ascension, « Les journées du chocolat ». Chaque artisan propose chez lui des visites, des démonstrations de la fabrication et des dégustations. C’est un véritable succès !

Bayonne fête son chocolat ()
Bayonne fête son chocolat le dernier weekend d’octobre

En 2018, l’Académie du Chocolat et la Ville de Bayonne s’unissent pour créer un évènement commun, « Bayonne fête son chocolat » qui a lieu le dernier weekend d’octobre de chaque année. Toute la ville est mise à contribution pour comprendre le parcours du cacao jusqu’au chocolat : expositions, découverte du travail des artisans, visites des ateliers, initiations, dégustations, etc.

S’il faut être raisonnable en mangeant du chocolat, celui de Bayonne a un gout très particulier. Et s’il faut une excuse pour en croquer, dites-vous simplement historien, à la découverte de l’histoire de Bayonne…. On ne résiste pas à sa richesse.

Serge Clos-Versaille

écrit en orthographe nouvelle

Références

Wikipédia
Académie du chocolat de Bayonne
Syndicat du chocolat




Secouristes, les gens discrets des montagnes

Il nous parait naturel d’être secouru en cas d’accident. Pourtant, en montagne, ce n’est que très récemment que des secouristes professionnels interviennent. Et cela reste un métier dangereux.

Les premiers secouristes

Certains attribuent aux Romains la création d’hospices à proximité des pòrts de montagne dans les Pyrénées. Pòrt en gascon signifie passage. En tous cas, au moyen-âge, les moines s’organisent pour venir en aide aux voyageurs et pèlerins : les recevoir pour une nuit, les restaurer, les soigner…

hopital saint blaise
L’hôpital Saint-Blaise (64) construite par les chanoines de l’abbaye Sainte-Christine du Somport au XIIe siècle.

Les Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem sont déjà habitués à défendre et soigner les pèlerins allant à Jérusalem. Dès le début du XIIIe siècle, ils installent des lieux semblables sur les chemins qui mènent à Compostelle. C’est le cas sur les chemins principaux qui passent par Saint Jean Pied de Port ou par le col du Somport. Et c’est aussi le cas sur les chemins secondaires qui passent par la Catalogne ou par les Pyrénées centrales.

D’ailleurs, le , Sanche Garsie comte d’Aure note dans une donation la présence d’un Hospitali beati Johanni de Juheu (hospice de Saint Jean de Jouéou) au pied du port de la Glère (Luchonnais). Aujourd’hui, la majorité de ces hospices ont disparu, même s’il reste des traces comme celles de l’hospice du port de Vénasque, l’étape qui venait après l’hospice de Saint Jean de Jouéou.

Durant des siècles, les autochtones savent vivre dans les montagnes. Les bergers savent sonder la neige de leur bâton, connaissent les endroits dangereux. Les marchands, les bandits et les contrebandiers fréquentent aussi les montagnes, ainsi que quelques autres comme les soldats. La majorité des usagers passent par les ports. Mais la montagne n’a pas bonne réputation. Elle est synonyme de dangers et de menaces.

Les chiens de sauvetage

C’est justement à un hospice que l’on doit la création de la race renommée des chiens de Saint-Bernard. Ce n’est pas dans les Pyrénées mais dans les Alpes suisses, aux hospices du Grand-Saint-Bernard et du petit Saint-Bernard, que des chanoines élèvent dès le XVIIe siècle des chiens de garde qui sont vite utilisés pour accompagner ou retrouver les voyageurs égarés dans la neige et le brouillard. L’hospice récupère ainsi des personnes frigorifiées, sans force ou même évanouies.

patou
Le patou ou chien de montagne des Pyrénées

En fait, les chiens, avec leur odorat très développé, sont très adaptés pour retrouver des personnes disparues ou accidentées.  Le pastor, patou en français ou chien des Pyrénées, est déjà connu au XVIIe siècle pour rechercher des personnes lors des avalanches.

Les organisations de secouristes

Dès le XVIIIe siècle, la montagne deviendra un lieu de découverte et de promenade avec le tourisme anglais dans la région paloise et le développement du pyrénéisme et du thermalisme.

Pic aneto
Pic d’Aneto

Les étrangers se font guider par des locaux. Il y a des accidents. Des cordées disparaissent. Le grand guide luchonnais des sommets, Pierre Barrau (1756-1824) meurt en dirigeant la première ascension au pic d’Aneto. Ce n’est que cent sept ans plus tard, en 1931, que le glacier de la Maladeta, la maudite, rend les restes de son corps.

Puis, au XIXe siècle, la solidarité montagnarde s’organise : les guides, les membres de club, les volontaires partent à l’aide de grimpeurs ou de randonneurs malchanceux.

Toutefois, ce serait à Annemasse, en Haute-Savoie que se serait constituée la première société de secouristes en France. Peut-être en 1897.

Vite, au début du XXe siècle, plusieurs sociétés de secours en montagne se créent dans les Pyrénées, tout le long de la chaine.

En s’inspirant de l’insigne autrichien, le Savoyard Felix Germain (1904-1992), très impliqué dans les secours, crée en 1949 l’insigne du Secours en montagne pour les Français. Cet insigne existe toujours et les montagnards le surnomment le berlingot. La remarquable Jeanne Folcher, membre de la Société Dauphinoise pour le Secours en Montagne (SDSM) et infirmière de la Croix-Rouge, reçoit le premier insigne.

Puis, en 1956, l’accident et la mort de deux étudiants, Jean Vincendon et François Henry dans le Massif du Mont-Blanc, va poser question. Les opérations de secours se passent mal. C’est le premier essai de sauvetage avec un hélicoptère. Mais les conditions météo déstabilisent l’appareil qui s’écrase avec ses quatre occupants qui, heureusement, ne seront que blessés. Ils voient les jeunes randonneurs mourir sous leurs yeux. La France s’émeut. En conséquence, la circulaire du 21 aout 1958 impose aux préfets l’organisation des secours en montagne. Ainsi, l’activité va se professionnaliser. Et l’on crée les premiers Pelotons de Gendarmerie de Haute Montagne (PGHM).

Les médecins rejoignent les secouristes

Le 30 mars 1970, deux pyrénéistes, Bernard Baudéan et René Garroté descendent la Grande aiguille d’Ansabère (vallée d’Aspe). Ils chutent. Bernard Baudéan raconte à Sud-Ouest :  Nous sommes arrivés au sommet puis la tempête s’est levée. Il devait être entre 14 et 15 heures. Nous avons décidé de descendre en rappel pour aller plus vite plutôt que par la voie normale. Au 2e ou 3e rappel, un piton a lâché. C’était très raide. J’ai vu mon copain disparaitre dans le vide. Il est tombé sans un bruit. J’ai appelé, il ne répondait pas. J’ai compris. René Garroté y laisse la vie et son compagnon perd huit doigts et ses deux pieds à cause du froid. On prend alors conscience de la nécessité de médicaliser les secours.

Louis Lareng
Louis Lareng (1923-2019).

Et c’est le médecin lavedanais Louis Lareng (1923-2019), qui fonde avec le docteur Madeleine Bertrand le service d’aide médicale urgente (SAMU).

Ainsi, pendant l’été 1973, une garde de secours en montagne avec des médecins du village s’installent à Gavarnie. Trois ans plus tard, Louis Lareng raconte les réalisations effectuées dans les Pyrénées lors du colloque « médecine montagne » organisé par la FFM (Fédération Française de la Montagne).

Citons aussi le docteur Jean-Michel Théas, enfant de Lourdes et président du secours en montagne,  qui organise dès 1982 les recyclages des pisteurs secouristes des Pyrénées et de la principauté d’Andorre. Amoureux de la montagne, il mourra d’un accident cardiaque sur le chemin du Pibeste, au-dessus d’Ouzous en 2013.

Le diplôme de médecine de montagne voit le jour en 1984. Et le Professeur Virenque (SAMU 31 Toulouse), met en place en 1990, le DUMUM : Diplôme Universitaire de Médecine et Urgences en
Montagne. Cette formation comprend 4 modules de 5 jours : sur les fondamentaux, la spéléologie et canyon, la montagne hivernale et la haute montagne.

Les spécialistes du secours

Trois organismes assurent aujourd’hui les secours en montagnes :

Ils interviennent suite à des glissades sur des névés, des dévissages, des avalanches, des accidents de parapente ou des chutes diverses. Et aussi pour des accidents cardiovasculaires, des malaises pouvant aller jusqu’au coma ou autre.

Ce sont parfois des interventions complexes. La chute dans une crevasse par exemple l’est particulièrement. En effet, la chaleur du corps fait fondre la glace et provoque son enfoncement progressif. Globalement, pour 20% des personnes secourues, le pronostic vital est engagé. La mortalité parmi les sauveteurs est aussi élevée.

sauvetage dans une crevasse
Sauvetage d’un randonneur qui a passé cinq nuits dans une crevasse de la Pierre Saint Martin. Sud-Ouest. 26/05/2016.

Des interventions d’endurance

Les interventions sont de plus en plus nombreuses.  Par exemple, le PGHM de Pierrefitte-Nestalas et la  CRS Pyrénées effectuent 462 interventions entre le 1er janvier et le 19 septembre 2022.  Elles seraient dues à l’inexpérience des touristes, à leur équipement insuffisant et aussi à de nouveaux sports comme le VTT de descente et électrique.

Les interventions ne sont jamais anodines. Par exemple, en juillet 2019, vers 19h50, les secouristes sont appelés pour ramener deux alpinistes qui se sont égarés alors qu’ils descendaient la face sud du Néouvielle. Or, la météo ne permet pas l’utilisation d’un hélicoptère. Aussi, les secouristes du PGHM de Pierrefitte-Nestalas et ceux PGHM de Bagnères-de-Luchon partent à pied. Ils mettront 14 h à les retrouver ! Enfin, le lendemain, à midi, tout le monde, sain et sauf, rejoint les véhicules.

Jacques Verdier
Jacques Verdier (1957-2018)

Plus dramatique, le journaliste sportif saint-gaudinois Jacques Verdier (1957-2018) raconte un sauvetage en 2016 au sommet du Vignemale. Les conditions atmosphériques sont mauvaises. L’hélicoptère accroche ses pales sur de la neige glacée provoquant sa chute : le pilote, le mécanicien, le médecin et le secouriste meurent dans l’accident.

Aujourd’hui, la quasi-totalité des sauvetages font appel à l’hélicoptère. Lors d’un interview, un pilote raconte : « Avec le vent, on sait que l’on va se faire brasser, mais le brouillard nous oblige à mille retenues. Il arrive que l’on ne voit plus les parois et aucun GPS ne nous permet d’apprécier convenablement les distances. Quant aux fils électriques, c’est la plaie de la profession. Il faut bien anticiper le parcours, connaitre les lieux à la perfection pour être sûr de les contourner, mais là encore la brume complique tout. »

En 2022, 8 secouristes de l’Ariège et 1 de Lannemezan remportent la médaille du secours en montagne.

Anne-Pierre Darrées

écrit en orthographe nouvelle

Références

FFME, médaille,  secours en montagne
Histoire et évolution du secours en montagne, F. Rocourt, 2014
Le monde des Pyrénées : L’histoire du secours en montagne dans les Pyrénées
Pyrénées vagabondes, Jacques Verdier, 2018




Armand Fallières

Armand Fallières (1841-1931) est un Gascon originaire du Lot et Garonne. Il est le seul Gascon devenu Président de la République française, de 1906 à 1913.

Une carrière de notable de province qui entre au Gouvernement

Armand Fallières (1841 - 1931) alors parlementaire
Armand Fallières alors parlementaire (1876-1899)

Armand Fallières nait le 6 novembre 1841 à Mézin dans le Lot-et-Garonne. Son grand-père est forgeron, son père est géomètre-arpenteur. Après le collège à Mezin, son père l’envoie à Angoulême pour perdre son accent gascon. Il n’y arrivera pas. Puis, il fait des études de droit à Toulouse et à Paris et devient avocat à Mézin en 1867. En particulier, il défend un groupe de jeunes gens qui ont chanté La Marseillaise au passage d’une procession.

En 1868, il épouse Jeanne Bresson avec qui il a une fille Anne-Marie et un fils André qui suivra la carrière son père. André sera chef de cabinet de son père au Sénat de 1899 à 1906, puis conseiller à l’Elysée de 1906 à 1913) Puis, il deviendra ministre du travail de 1926 à 1928 dans le cabinet de Raymond Poincaré.

Madame Fallières en 1908
Madame Fallières en 1908

Attiré par la politique, Armand Fallières entre au conseil municipal de Nérac en 1868 et en devient maire en 1871. Alors, il rétablit l’école primaire supérieure à Nérac et instaure la gratuité des cours. Puis, il entre au Conseil général du Lot et Garonne et en devient Président en 1874. Il est à l’origine de la construction de la voie ferrée Nérac-Mézin-Mont de Marsan pour désenclaver le Lot et Garonne. Il devient Député en 1876.

 

Armand Fallières entre au Gouvernement

Armand Fallières alors Président du Sénat
Armand Fallières alors Président du Sénat (1899-1906)

Le Gascon monte à Paris. Il est Secrétaire d’État à l’Intérieur (1880-1881), Ministre de l’Intérieur (6 mois en 1882), Président du Conseil (2 mois en 1883), puis successivement Ministre de l’Intérieur (6 mois en 1887), de la Justice (1887-1888), de l’Instruction publique (1889-1890) et de la Justice (18830-1892). C’est « la valse des portefeuilles » !

Il est le promoteur de la loi de réconciliation nationale de 1881 qui réhabilite les insurgés du coup d’état de 1851. Dans l’arrondissement de Nérac, 205 pensions sont accordées.

En 1892, Armand Fallières devient Sénateur du Lot et Garonne. Puis, il est élu Président du Sénat en 1899 en remplacement d’Emile Loubet élu Président de la République. Il préside la Haute Cour de Justice qui juge les coupables d’une tentative de coup d’État lors des obsèques du Président Félix Faure.

Mais la droite nationaliste s’agite. Pendant huit jours, Paris connait des manifestations et des heurts avec la police. On s’attend à un coup de force sur l’Elysée. Le 23 février, lors des obsèques, Paul Déroulède tente d‘entrainer dans cette tentative de coup d’état le général Roget qui rentre avec sa troupe à la caserne de Reuilly. Le coup d’état échoue et Paul Déroulède est jugé devant la haute Cour de Justice. Il est acquitté.

Armand Fallières est élu Président de la République

Armand Fallières élu président de la Répblique en 1906 (carte postale)
Armand Fallières élu président de la République en 1906 (carte postale)

Le 17 janvier 1906, Armand Fallières succède à Emile Loubet en tant que Président de la République. Notons qu’il lui avait déjà succédé en tant que Président du Sénat.

Sous la IIIe République, le Président de la République n’a pas de rôle politique influent. Toutefois, Armand Fallières veut rapprocher la fonction présidentielle des Français. D’ailleurs, il devient très populaire et on le surnomme « le père Fallières ».

Il voyage beaucoup en province. Pour cela, il remplace les calèches officielles par les automobiles. Son premier voyage officiel est pour sa terre natale : la Gascogne (Agen, Allemans du Dropt, Marmande, Villeneuve sur Lot). Les photos de ce voyage sont à disposition sur le site des Archives départementales du Lot et Garonne.

Les actions d’Armand Fallières

Narbonne, charge de la cavalerie sur les viticulteurs les 19 et 20 juin 1907
Narbonne, charge de la cavalerie sur les viticulteurs les 19 et 20 juin 1907

Armand Fallières est contre la peine de mort et gracie les condamnés. En 1908, la Chambre des députés examine un projet de loi d’abolition de la peine de mort. Mais, le projet de loi n’obtient pas de majorité.

De nombreuses réformes marquent la présidence d’Armand Fallières dont la création de l’impôt sur le revenu en 1907 en remplacement des contributions directes. La même année, Georges Clémenceau, alors président du Conseil,  fait face à de nombreuses grèves et réprime la révolte des vignerons du Midi. Armand Fallières définit en 1909 les trois zones de production de l’Armagnac (Bas-Armagnac, Haut-Armagnac, Ténarèze).

Les relations internationales se tendent. Face à la Triple Alliance (Allemagne, Autriche-Hongrie, Italie), Armand Fallières voyage beaucoup en Europe pour renforcer la Triple Entente (France, Russie, Royaume-Uni).

Le Château de Loupillon
Le Château de Loupillon à Villeneuve de Mézin (Lot-et-Garonne)

Le mandat de Président de la République d’Armand Fallières se termine en 1913. Il ne se représente pas en disant : « la place n’est pas mauvaise, mais il n’y a pas d’avancement ». Et il se retire dans sa propriété de Loupillon, près de Mézin. Pendant la guerre, il la transforme en hôpital et il y meurt le 22 juin 1931.

 

Un Président caricaturé

Fallières (Petit Parisien illustré, 1909)
Agression contre Fallières (Petit Parisien illustré, 1909)

La mode est à la caricature politique. Parfois féroce. Armand Fallières est sans doute une cible de choix.

Il faut dire que dès son arrivée à la présidence, il a mis fin à l’affaire Dreyfus. Ses ennemis sont nombreux. Son embonpoint et sa bonhommie s’y prêtent. Ne parlons pas de son accent !

Lors d’une promenade sur les Champs-Elysées, Jean Mattis, garçon de café et membre de l’Action Française, se jette sur Armand Fallières et lui tire la barbe. Il explique son geste à la police : « Je suis Jean Mattis, 34 ans, garçon de café. Je suis très content de ce que j’ai fait ; je voulais donner une leçon au chef de l’Etat qui se moque du monde. Je suis inspiré par Dieu et mon geste est destiné à dénoncer ses alliances scandaleuses avec les Francs-Maçons ».

Toute la presse s’en émeut. Les ambassadeurs font part de leur soutien à Armand Fallières. L’ambassadeur allemand s’indigne de l’attentat et envoie un message de sympathie très appuyé qui fait dire au chef de cabinet d’Armand Fallières : « Encore une agression comme cela et ils sont capables de nous rendre l’Alsace et la Lorraine, rien que pour nous consoler ! ».

M. Fallières déménage !
M. Fallières déménage !

Le mouvement de l’Action Française vend même un jouet articulé. Par un ingénieux jeu de ficelles, on peut tirer la barbe d’Armand Fallières. Le jouet est interdit à la vente et les revendeurs sont inculpés d’outrage à un magistrat de l’ordre administratif. En tout cas, l’affaire est suffisamment prise au sérieux pour que soit renforcée la protection des ministres et la garde doublée aux Assemblées.

Serge Clos-Versaille

écrit en orthographe nouvelle

Références

Wikipédia
Archives du Lot et Garonne : Armand Fallières
Abolition de la peine de mort. Le débat de 1908 à la Chambre des députés
Armand Fallières: 1841-1931 : de Mézin à l’Elysée, documents réunis et présentés par S. Baumont, S. Caillaouze et P. Polivka,  Service éducatif des Archives départementales de Lot-et-Garonne, 1986




Montréjeau et ses trésors

En traversant une ville, on voit l’église, la place centrale, et si on a un peu de temps, l’office de tourisme et quelques commerces. Pourtant, beaucoup d’entre elles ont des trésors cachés. Et c’est bien le cas de Montréjeau.

Montréjeau, bastide royale

Mont reiau [Montréjeau] signifie Mont royal. C’est une bastide fondée en 1272, en paréage entre Eustache de Beaumarchès, sénéchal du roi de France à Toulouse, et Arnaud d’Espagne-Montespan.

Comme souvent, l’affaire est profitable aux deux parties. Car, ainsi, le roi s’implante en Comminges, au milieu des possessions des Foix-Béarn en Nebouzan – Cela lui permet de surveiller ces remuants seigneurs. Et, d’autre part, Arnaud d’Espagne-Montespan obtient une étape sûre entre ses deux domaines de Montespan et de la vallée du Louron.

De plus, la bastide de Mont reiau est une réussite. En effet, trente ans après sa fondation, elle est entourée d’un rempart et est entièrement peuplée.

Montréjeau - la place centrale de la bastide
Montréjeau – la place centrale de la bastide et ses arcades

Bien sûr, les fondateurs la dotent de coutumes octroyées aux habitants, qui seront réécrites en 1435 (elles contiennent 228 articles) et en 1619.

Montréjeau - Pont sur la Garonne
Montréjeau – Pont sur la Garonne

Mont reiau tient un marché hebdomadaire. Et elle tient aussi deux foires annuelles à la Trinité et à la Saint-Barthélemy. Par ailleurs, la construction du pont sur la Garonne au XIVe siècle assure le succès de ses foires. Plus tard, Henri IV (1553-1610) lui en concède deux nouvelles à la Saint Mathias et à la Saint-André.

C’est aussi le siège de la judicature de la jugerie de Rivière. Ainsi, les professions de loi y prospèrent.

Mais, Mont reiau subit les affres des guerres de religion, sert de garnison lors des guerres avec l’Espagne. Et elle est le théâtre de la bataille de Montréjeau qui met fin aux espoirs royalistes en 1799.

La place Bertrand Larade

Il n’est pas habituel de voir une place porter le nom d’un grand poète gascon du XVIIe siècle.

En effet, Bertrand Larade (1581-1635 ?) est né à Montréjeau. Issu d’une famille de notables, il étudie le droit à Toulouse avant de se consacrer entièrement à la poésie. Il devient l’ami de Goudouli, grand poète toulousain. De plus, Bertrand Larade reçoit un prix aux Jeux Floraux en 1610, puis, il abandonne le français pour ne plus écrire qu’en gascon.

La Margalide gascoue

Sa Margalide gascoue, éditée en 1604 – il a 22 ans–, contient 96 sonnets dont le sonnet XXXVII sur Montréjeau, lieu de résidence de son amour :

Chant Royal - B Larade - la Margalide Gascoue (1604)
B Larade – La Margalide Gascoue (1604)

Mourejau ey lou loc de ma neichense,
Mourejau ey lo loc de la beutat,
Doun trop jouen jou’m trobey amatat,
Et force’m houc de’u da m’aubesience.

En Mourejau be he sa residence,
En exerçan sur my sa crusautat,
Et sa berou m’a tan plan tormentat,
Que cauque cop perde’m he paciense.

Et nou i a arrenc com noste Mourejau,
De y demoura lou bet loc be s’ac bau:
Courren aupres la Garona, et la Neste: 

Lou Roussinon nou pousque aillous boula
Qu’a Mourejau que d’et hé tant parla,
Per ma Margot suber toutes auneste.

Montréjeau est le lieu de ma naissance,
Montréjeau est le lieu de la beauté,
Par quoi trop jeune je me suis trouvé anéanti,
Et à qui force m’a été de faire obéissance.

À Montréjeau, elle a sa résidence,
En exerçant sur moi sa cruauté,
Et sa fureur, elle m’a si bien tourmenté
Que quelquefois elle me fait perdre patience.

Et il n’y a rien comme notre Montréjeau,
Il vaut la peine de résider en ce beau lieu :
Auprès duquel courent la Garonne et la Neste :

Le rossignol ne pourrait voler ailleurs
Qu’à Montréjeau qui fait tant parler de soi,
Grâce à ma Margot sur toutes les autres honnête.

L’hôtel de Lassus à Montréjeau

Montréjeau - Hôtel de Lassus
Hôtel de Lassus

Le XVIIe siècle est aussi celui de l’émergence de la famille de Lassus, l’une des plus importantes de Montréjeau.

Marc-François de Lassus (1692-1780) est, comme son père, subdélégué de l’Intendant d’Auch et Contrôleur général des Marbres du Roi. En 1760, il fait construire un magnifique hôtel particulier en pierre de Gourdan.

La famille de Lassus donnera un conseiller au Parlement de Toulouse, guillotiné à Paris sous le nom de M. de Nestier, un maire de Montréjeau, un conseiller général, un député, un célèbre pyrénéiste ami d’Henry Russel et deux présidents de la Société d’Etudes du Comminges. En sus, en 1865, les de Lassus sont faits barons héréditaires.

À l’initiative du Maréchal Foch, l’hôtel de Lassus abrite le séminaire de Montréjeau de 1929 à 1970. Aujourd’hui, il accueille des services de la communauté de communes, dont l’office de tourisme. Et, il est inscrit au titre des Monuments Historiques en 2005.

Le château de Valmirande

Le comte Henry Russell et le Baron de Lassus en 1894
Le comte Henry Russell et le Baron de Lassus en 1894

Bertrand de Lassus (1868-1909) fait construire le château de Valmirande, à l’imitation des châteaux Renaissance de la Loire. Les travaux durent de 1893 à 1899.

On remarque la propriété de 41 hectares, clôturée par un mur qu’on longe, à la sortie de Montréjeau, en prenant à la route de Lannemezan et de Tarbes.

C’est l’architecte bordelais Louis Garros qui construit le château. Denis et Eugène Bühler, concepteurs du parc de la Tête d’Or à Lyon et du parc Borelli à Marseille, se chargent du parc, qui contient plus de 180 espèces d’arbres et d’arbustes. Plus tard, en 1912, Édouard-François André, le concepteur des parcs de Monte-Carlo, dessine deux parterres à la française supplémentaires.

Une tour d’aspect médiéval abrite un calorifère à vapeur pour chauffer le château.

Des dépendances en style montagnard abritent une des plus belles écuries de France. De plus, une tour du bâtiment rappelle le clocher de l’église de Saint-Bertrand de Comminges que l’on voit depuis Valmirande. D’ailleurs, on raconte que Bertrand de Lassus communiquait à vue avec le curé de Saint-Bertrand. En tous cas, la vue est bien dégagée entre les deux lieux.

Dès 1899, le château de Valmirande est occupé. Et l’hôtel de Lassus situé dans Montréjeau est vendu.

Il est classé en 1976, le parc en 1979 et les dépendances en 1992. Le château habité n’est pas visitable, sauf la chapelle. Le parc et les dépendances font l’objet de visites guidées.

Montréjeau - Château de Valmirande
Montréjeau – Château de Valmirande

Références

Bertrand Larrade – La Margalida gascoue et Meslanges (1604), édition critique de Jean-François Courouau.
Notre histoire, mairie de Montréjeau
Les statuts et coutumes de la ville de Montréjeau, baron de Lassus,  1896
Le château de Valmirande, mairie de Montréjeau




Les feux dans le pinhadar

Le pinhadar connait régulièrement de gigantesques incendies comme celui de l’été 2022. Hélas, ce n’est pas le premier grand incendie qui touche le pinhadar. La prévention et la lutte contre les feux de forêts est une préoccupation constante.

Le grand incendie de 1755 dans le Marensin

Le Marensin est couvert d’un pinhadar naturel. Les incendies y sont fréquents mais ils ne font pas de grands ravages. En fait, dès qu’un incendie se déclare, toute la population s’organise pour lutter contre le feu. Il est vrai que le pinhadar du Maransin est une importante ressource économique qui profite à toute la population.

Pourtant, en avril 1755, un grand incendie ravage le Marensin.

La correspondance de l’Intendant d’Etigny avec le Contrôleur Général nous révèle les faits

Antoine Mégret d’Etigny (1719-1767)
Antoine Mégret d’Etigny (1719-1767)

En fait, le feu est accidentel : un particulier qui prépare le repas pour des charbonniers met le feu à la cabane. D’Etigny écrit : Il mit le 5 de ce mois le feu à la cabane de planches où il était et, en très peu de temps, le pignada fut incendié. Le feu se communiqua tout de suite dans la paroisse de Castets au Levant, et dans celle de Linxe au Nord, et les ravage toutes de même que celle de Talles et Lesperon, indépendamment de quelques autres communautés de la Généralité de Bordeaux, entre autres celle de Dorignac.

Malheureusement, le feu détruit tout sur son passage : maisons, moulins, ruches. Et il y a de nombreux morts surpris par le feu porté par un vent impétueux et parce que les flammes se communiquaient avec autant de vitesse qu’un cheval allant le grand galop.

On craint une reprise du feu à tout moment. En effet, il n’est pas éteint et ne le sera-t-il pas même de longtemps, parce qu’il est dans la racine des arbres et qu’il faut des mois entiers pour qu’il puisse s’éteindre, à moins qu’il ne survienne des pluies abondantes.

La population est en état d’alerte : les habitants qui n’ont pas tout perdu sont-ils occupés jour et nuit à faire une garde exacte pour pouvoir se porter dans les endroits où le feu paraitrait vouloir se ranimer et faire en sorte de l’étouffer tout de suite avec du sable.

Mais, le 21 avril, d’Etigny signale un nouvel incendie à Rions et à Magescq. Et encore le 8 mai, un autre à l’Espéron et à Onesse.

Le Marensin connait d’autres incendies ravageurs en 1803 au cours duquel 700 000 pieds de pins disparaissent et, en 1822, sur les communes de Messanges, Moliets et Soustons.

Des feux de forêt qui se multiplient avec le boisement en pins

Résinier du Marensin – Bonnard, Camille (1794-1870) © Gallica

La loi de 1857 organise le boisement des Landes. Mais la chose ne se fait pas sans résistance de la part des bergers. Alors, des incendies se déclarent un peu partout. De 1869 à 1872, 24 000 hectares de jeunes plantations brulent dans les Landes ; en 1870, ce sont 2 261 hectares dans le Lot et Garonne et 10 000 hectares en Gironde.

Le gouvernement s’en émeut et charge Henri Faré (1828-1894), Directeur général de l’administration des forêts, d’une enquête qu’il réalise en 1873 : Je me suis rendu successivement à Dax le 28 février, à Mont-de-Marsan le 30, à Captieux le 1l mars, à Bazas le 5, à Villandraut le 6, à Bordeaux le 7, et à Agen le 11 mars. Quarante-neuf déposants ont été entendus et plusieurs dépositions écrites ont été recueillies ; le nombre de ces dernières dépasse cinquante.

Les déposants sont quasi unanimes : Les incendies sont dus en grande partie aux mécontentements qui se sont produits par suite de l’ensemencement trop rapide des landes.

M. de Lacaze, propriétaire à Casteljaloux ajoute : Une partie des petites landes dont jouissaient les communes fut attribuée en 1828, à la suite d’un procès, au duc de Bouillon. Ces landes ont été vendues à de grands propriétaires qui les ont ensemencées, et elles ont été brulées. En 1848, ces mêmes terrains, ensemencés de nouveau, furent vendus, et le feu y a encore été mis par place. Par conséquent, ces évènements sont liés à la succession du duc de Bouillon.

Lutter contre les feux de forêt

Coupe-feu à Hourtin (32) pour lutter contre les incendies
Coupe-feu à Hourtin (32)

Henri Faré cherche à connaitre l’origine des incendies et les mesures qu’il convient de prendre pour s’en préserver et lutter efficacement contre les incendies. Dans les forêts domaniales, les pare-feux sont efficaces. Aussi, il veut savoir s’il faut les généraliser.

Pourtant, les moyens de lutte sont dérisoires. Ils consistent à « disposer les travailleurs sur une route ou sur une ligne de pare-feu parfaitement débarrassée de matières combustibles. Chacun d’eux est pourvu d’une perche munie de ses feuilles vertes ; et c’est en frappant les parties embrasées, soit sur le périmètre de la ligne, soit en arrière, lorsqu’un nouveau foyer produit par des flammèches portées au loin vient à éclater, qu’on arrête l’incendie ».

Bien sûr, il y a d’autres grands incendies : 1892 au cours duquel 10 personnes périssent ; 1898, année de sècheresse, 50 000 hectares sont perdus.

L’incendie meurtrier de 1949

Au sortir de la guerre, la forêt manque d’entretien. Les coupe-feux sont dans les broussailles, on ne peut y accéder. L’été 1949 est caniculaire, comme ceux de 1947 et 1948.

Hélas, le 19 août, un incendie se déclare à Saucats. L’imprudence du gardien d’une scierie déclenche le feu par un mégot de cigarette mal éteint. Or, les vents violents et changeants poussent l’incendie sur les communes de Cestas, Marcheprime et Mios.

Les sauveteurs, acheminés sur place, luttent contre les flammes avec des branches d’arbre. Ils allument des contrefeux mais le vent ramène le feu dans une autre direction. Donc, il faut recommencer plus loin.

Alors, on appelle La troupe en renfort. Des soldats anglais prêtent main forte. Heureusement, les pompiers de Paris sauvent le village de La Brède.

En Gironde, le feu ravage Saucats, le 20 août 1949
Le 20 août 1949, le feu ravage Saucats (Gironde)

Le feu ne recule pas

En 1949, incendie à Saint Jean d'Illac et Toctoucau (Gironde)
En 1949, incendie à Saint Jean d’Illac et Toctoucau (Gironde)

Le 20 août, le feu menace Salles et Mios. Il parcourt 4 kilomètres par heure. Enfin, grâce aux contre feux, le sinistre ralentit.

Puis, vers 15 h, le vent change soudain de direction et ranime l’incendie. Il parcourt 6 000 hectares en seulement 20 minutes. Et les sauveteurs se retrouvent pris au piège.

Une catastrophe humaine

On compte 82 morts, brulés vifs, dont 26 habitants de Canéjan, 16 de Cestas et 23 soldats du 33° régiment d’artillerie de Poitiers, venus en renfort. Un survivant raconte l’horreur : On voyait les flammes courir tout au long de leurs corps étendus ; la graisse gonflait et les flammes gouttaient au bout de leurs souliers, de leurs bottes ou de leurs sabots carbonisés … On décrète le 24 aout, jour de deuil national.

En outre, toute la région est plongée dans le noir. En effet, une pluie de cendres et d’aiguilles carbonisées tombe sur Bordeaux. La fumée se voit à 100 km à la ronde. Enfin, le vent tombe vers 22 heures. Les incendies se calment, les derniers feux s’éteignent le 25 aout. Toutefois, l’incendie a ravagé 52 000 hectares.

Ce grand incendie sera le point de départ d’une réflexion sur les moyens de lutte à mettre en place et à généraliser.

Voir ici les informations télévisées de 1949, INA.

Les moyens de prévention et de lutte contre les feux de forêt

Prévenir les feux de forêt - campagne d'information
Prévenir les feux de forêt – campagne d’information

Aujourd’hui, le Pinhadar comprend 42 000 km de pistes forestières que les pompiers peuvent emprunter pour s’approcher du feu. On a aménagé des puits, des citernes enterrées et des étangs dans tout le massif. En tout, 5 000 points d’eau sont à la disposition des pompiers.

Mais ces aménagements ne doivent pas faire oublier que la prévention des feux est le premier moyen de lutte en évitant qu’ils ne démarrent. Et on sait que 90 % des feux sont d’origine humaine : activités agricoles, mégots de cigarette, barbecues, feux de camp, etc.

Ainsi, les touristes comme les riverains peuvent éviter les comportements dangereux, en ayant les bons réflexes au quotidien.

Des gestes simples suffisent en période sèche ou de canicule : éviter de stocker des combustibles près de la maison, ne pas utiliser d’outils susceptibles de provoquer des étincelles, ne pas fumer dans les friches ou les champs, ne pas jeter des mégots.

Le reste de l’année, il faut débroussailler son jardin sur 50 mètres tous les abords de construction lorsqu’elles se situent à au moins 200 mètres d’une forêt. Il faut enlever les arbres et les branches à moins de 3 mètres d’une maison, retirer les arbres et les plantes mortes, libérer les voies d’accès de tout encombrement.

Quant aux moyens humains et matériels déployés par la Sécurité civile, il convient de ne pas tomber dans le piège du sensationnel et de la polémique systématique : les moyens étaient-ils suffisants ? Aurait-on pu l’éviter ? etc.

Les grands incendies surviennent par temps d’extrême sècheresse comme celle de l’été 2022. Alors, chacun doit veiller à appliquer les mesures de prévention. 

Serge Clos-Versaille

écrit en orthographe nouvelle

Références

Wikipédia.
Enquête sur les incendies de forêts dans la région des Landes de Gascogne, Henri FARÉ, 1873.
Les incendies de forêts dans les Landes au XVIIIe siècle, Maurice BORDES, Bulletin de la Société Archéologique du Gers, 1948-07.




Gustave Lassalle-Bordes, un peintre maltraité ?

Le Bézollais Gustave Lassalle-Bordes est un peintre remarquable. Ayant travaillé avec les plus grands, il trouvera finalement la paix dans son Gers natal.



G. Lassalle-Bordes apprend la peinture

Gustave Lassalle-Bordes nait en 1814 ou 15 dans le Gers, probablement à Besòlas [Bézolles], où se situe sa maison. À 17 ans, il monte à Paris afin d’étudier la peinture.  Il est alors l’élève du célèbre Paul Delaroche (1797-1856), spécialiste de la peinture historique.

Il travaillera aussi avec d’autres peintres d’histoire comme Charles-Philippe Larivière (1798-1876).

Paul Delaroche – Autoportrait

En 1835, il commence à exposer et attire l’attention. Ainsi, l’année suivante, le peintre Jules-Claude Ziegler (1804-1856) le prend dans son équipe pour réaliser un marché qu’il enlève justement à Paul Delaroche. Il s’agit de réaliser une grande fresque pour l’église de La Madeleine appelée L’histoire du christianisme.

Très vite, l’État lui commande en direct un tableau que Gustave présentera au Salon de 1837. À cette occasion, c’est le réputé Eugène Delacroix qui le remarque.

Jules Ziegler – Histoire du christianisme, dôme de l’église de la Madeleine (fresque)

G. Lassalle-Bordes élève de Delacroix

Eugène Delacroix par Nadar

Gustave rejoint l’atelier du maitre en 1838. Outre son travail d’assistant, il occupe aussi celui de massier, c’est-à-dire qu’il assure un certain nombre de tâches d’intérêt commun comme la gestion des finances de l’atelier.

Notre Gersois sera le principal assistant de Delacroix pendant plus de 12 ans. Dès le départ, les relations sont bonnes et Gustave admire la créativité et le sens esthétique du grand peintre. D’ailleurs, Delacroix précise dans une de ses lettres : je vous remercie bien de l’amitié que vous témoignez et qui est devenue aussi pour moi une nécessité.

Toutes ces lettres, Delacroix les envoie à Bézolles. Car Gustave n’oublie pas son Gers natal et s’y rend régulièrement pour se reposer. Et lors de ses absences, le maitre l’incite à revenir assez vite, comme on peut le lire dans plusieurs lettres dont celle du 31 octobre 1842 : J’espère que votre séjour à la campagne vous aura délassé des fatigues que vous a causées la coupole [coupole de la bibliothèque de la Chambre des pairs au palais du Luxembourg], à laquelle vous avez travaillé avec tant d’abnégation et, je puis dire, avec succès.

La mort de Cléopâtre, œuvre majeure

En 1845, Lassalle-Bordes peint un tableau, La mort de Cléopâtre, qu’il exposera au Salon de 1846. Le peintre en recevra une médaille d’or.

Charles Baudelaire (1821-1867), alors critique d’art et journaliste, note l’originalité et la beauté de la toile. Il écrit :

Ce qu’il y a d’assez singulier dans la Mort de Cléopâtre, par M. Lassale-Bordes, c’est qu’on n’y trouve pas une préoccupation unique de la couleur, et c’est peut-être un mérite. Les tons sont, pour ainsi dire, équivoques, et cette amertume n’est pas dénuée de charmes.

La mort de Cléopatre

Cléopâtre expire sur son trône, et l’envoyé d’Octave se penche pour la contempler. Une de ses servantes vient de mourir à ses pieds. La composition ne manque pas de majesté, et la peinture est accomplie avec une bonhomie assez audacieuse ; la tête de Cléopâtre est belle, et l’ajustement vert et rose de la négresse tranche heureusement avec la couleur de sa peau. Il y a certainement dans cette grande toile menée à bonne fin, sans souci aucun d’imitation, quelque chose qui plaît et attire le flâneur désintéressé.

La brouille avec Delacroix

Le 4 septembre 1848, Delacroix écrit à Lassalle-Bordes en vacances à Bézolles : Je pense souvent aussi et avec bien du plaisir à nos travaux ; ce souvenir me reporte à tant de choses qui ont changé que j’ai peine à croire que de tels moments puissent renaître. Quand serons-nous ensemble devant une belle muraille, la brosse en main, n’ayant pas d’autres soucis que de faire le mieux possible !

Toutefois, Eugène Delacroix conçoit ses œuvres, leur composition et laisse leur réalisation à son principal assistant, Lassalle-Bordes. Ainsi Delacroix en conserve le prestige et la technicité du Gersois est passée sous silence, du moins c’est ce que ressent notre peintre. Et il s’en accommode de moins en moins.

En 1849, suite à une morsure de chien à Bézolles, Lassalle-Bordes écrit ne pas pouvoir revenir auprès du maitre. Il restera plusieurs mois dans le Gers (au moins six mois), laissant des travaux inachevés. Delacroix en est fâché car il doit trouver d’autres assistants, moins formés et moins talentueux. Et les chantiers trainent. Delacroix suspend le salaire qu’il lui verse, les liens se distendent. Mais le summum arrive l’année suivante. Gustave accuse Delacroix d’être intervenu pour empêcher le baron Haussmann (1809-1891), préfet de la Seine, de lui donner à décorer tout le sanctuaire de l’église de Belleville, nouvellement construite.

Il écrira : il fut trouver ces messieurs et les supplia de ne pas me donner ce travail, parce qu’il avait besoin de moi, qu’il ne pourrait pas me remplacer, et que ses travaux allaient être arrêtés. Il était lié avec Fould, il était depuis quelques mois membre du conseil municipal de Paris je fus sacrifié, malgré l’annonce que ces messieurs m’avaient faite de ces deux commandes qui, par leur importance, me permettaient de montrer ce que j’avais acquis d’expérience dans la peinture ornementale. 

La déception

Le Gersois n’avait peut-être pas bon caractère. Cependant, au XIXe siècle, les relations entre maitre et élèves changent et ces derniers ne sont plus prêts à rester dans l’ombre. S’il reconnait volontiers les qualités de composition de Delacroix, Gustave admet mal que trois ans de travail à peindre la coupole du Luxembourg par exemple soient ignorés. Pour lui, l’exécution, la luminosité, l’ambiance finale, le rendu sont l’œuvre du réalisateur et non du concepteur. Aussi, il attend une plus grande reconnaissance du maitre.

D’ailleurs, il écrira :

Un fait assez drôle se passa au Luxembourg. Le bibliothécaire, M. Carré, me saluait depuis trois ans avec une très grande déférence, croyant saluer Delacroix. Un jour, un de mes amis vint me demander et du bas de l’échafaudage m’appela « Lassalle ». Je descendis. Quand je fus seul, M. Carré s’approcha de moi et nie dit :
— Vous n’êtes donc pas M. Delacroix ?
— Non, monsieur, je suis son élève.

— Mais c’est bien M. Delacroix qui est chargé de faire ce travail ! Comment se fait-il que je ne l’ai jamais vu ?
— Il vient à des heures où vous n’y êtes pas.
— Comment cela ! Mais je suis toujours à mon poste !
À partir de ce moment. M. Carré me prit en belle affection, et m’avertit que je faisais là un métier de dupe.

G. Lassalle-Bordes s’installe à Auch

Après sa brouille avec Delacroix, en 1851, Gustave quitte la capitale et s’installe à Auch. Fort de ses médailles, des critiques positives et de sa collaboration avec Delacroix, il trouve un emploi de professeur de dessin dans les écoles communales et reçoit plusieurs commandes.

Eglise Saint-Nicolas de Nérac – Choeur

Par exemple, il est chargé en 1854 de la décoration de l’église Saint-Nicolas de Nérac. Ou encore le marquis de Pins lui confie en 1865 la décoration du château de Montbrun (Gers) récemment reconstruit.

Cette même année, il milite pour la réalisation d’une galerie de portraits d’illustres Gersois.

Ainsi, il fournit huit portraits qui décoreront la Salle des illustres de l’hôtel de ville d’Auch en 1868. Hélas, l’accueil est mitigé. Pourtant il continue à exposer et réaliser des commandes dont une série de tableaux religieux pour la cathédrale de Condom.

Le souvenir

Enfin, en 1872, il est nommé professeur de dessin au lycée d’Auch.

En 1879, Gustave Lassalle-Bordes écrit au critique d’art Philippe Burty (1830-1890) ces mots douloureux : (…) en 1854 je quittais Eug. Delacroix, le coeur brisé, après une affreuse déception. J’ai su qu’il avait souffert autant que moi de cette séparation. Delacroix, à qui j’avais voué un attachement si grand, que j’avais aidé avec tant d’abnégation pendant dix ans, dans les travaux les plus ardus qu’il était incapable physiquement d’entreprendre, étouffa l’affection qu’il avait pour moi dans un égoïsme qui a brisé ma carrière d’artiste, et serait une tache dans ma vie si je ne lui pardonnais pas le mal qu’il m’a fait.

Philippe Burty

Il ajoute : Mais de ce mal est résulté un bien pour moi, car j’ai trouvé dans mon pays natal un accueil bien flatteur et des amitiés bien douces, qui, somme toute, valent mieux que les fumées de la gloire.

Il meurt en 1886 à Auch. On retrouvera dans un grenier des centaines de dessins de grande qualité.

Anne-Pierre Darrées

écrit en orthographe nouvelle

Références

Delacroix et ses élèves d’après un manuscrit inédit, Romantisme, Anne Larue, 1996
Correspondance d’Eugène Delacroix
Salons de 1846,Baudelaire, vol. II, p. 77-198.
Gustave Lassalle Bordes au Musée d’Occitanie (Toulouse)
Gustave Lassalle Bordes – Oeuvres diverses sur Wikimedia

https://www.ladepeche.fr/article/1999/07/15/238101-le-sejour-gascon-de-cleopatre.html




Voyage à Bazas

Capitale du peuple des Vasates, Vasats en gascon, Bazas en français, est une ville importante qui est âprement disputée pendant la guerre de Cent ans. En partie détruite lors des guerres de religion, elle a conservé les marques de son prestigieux passé.



Cossium, la patrie du poète Ausone

Buste d'Ausone, rue Ausone à Bordeaux
Buste d’Ausone de Bertrand Piéchald, Rue Ausone à Bordeaux

Decimus Magnus Ausonius (309-395), plus connu sous le nom d’Ausone, fait une carrière dans le cursus honorum romain. Sa famille possède plusieurs domaines entre Bordeaux, Bazas [Cossium de son nom romain] et Marmande.

Il étudie à Bordeaux et à Toulouse puis enseigne la rhétorique et la grammaire à Bordeaux.

Son grand-père est précepteur de la famille impériale. En 364, le nouvel empereur Valentinien l’appelle auprès de lui comme précepteur de son fils Gratien. Ainsi, Ausone jouit des faveurs de l’empereur. D’ailleurs, il est Comte du Palais en 367, Questeur du palais en 374, Préfet du prétoire des Gaules en 377 et 378, Consul en 379 et enfin Proconsul d’Asie.

Ausone le poète

Ausone met fin à sa carrière politique en 381. Il revient alors à Bordeaux et compose des poèmes qui célèbrent la joie de vivre, la table et les vins. Voici ce qu’il dit de Bordeaux (extrait) :

Burdigala est le lieu qui m’a vu naitre : Burdigala où le ciel est clément et doux ; où le sol, que l’humidité féconde, prodigue ses largesses ; où sont les longs printemps, les rapides hivers, et les coteaux chargés de feuillage. Son fleuve qui bouillonne imite le reflux des mers. L’enceinte carrée de ses murailles élève si haut ses tours superbes, que leurs sommets aériens percent les nues. On admire au dedans les rues qui se croisent, l’alignement des maisons, et la largeur des places fidèles à leur nom ; puis les portes qui répondent en droite ligne aux carrefours, et, au milieu de la ville, le lit d’un fleuve alimenté par des fontaines ; lorsque l’Océan, père des eaux, l’emplit du reflux de ses ondes, on voit la mer tout entière qui s’avance avec ses flottes.

La poésie d’Ausone n’a plus le même attrait fin XIXe siècle. Ainsi, Ferdinand Lot (1866-1952), célèbre historien et médiéviste, trouve Ausone ennuyeux et sans originalité.  Il reprend ainsi l’avis du latiniste René Pichon (1869-1923) qui déclare : Son style, bourré de citations, de plagiats et de pastiches, est celui d’un vieux professeur qui a la tête meublée d’expressions consacrées et qui croit rendre aux auteurs qu’il a si longtemps expliqués un suprême hommage, en pensant et en parlant sans cesse d’après eux.

En tous cas, les écrits d’Ausone restent un riche témoignage de son époque.

Ausone, vue d'artiste (XVIIe siècle)
Ausone, vue d’artiste (XVIIe siècle)

Et notons que c’est en l’honneur du poète Ausone qu’un domaine de Saint-Emilion prend le nom de Château Ausone depuis au moins 1592. On pense qu’il se situe sur une ancienne propriété du poète. Ce vin de grande réputation entre dans la catégorie premier grand cru classé A. Le domaine produit aussi un second vin appelé Chapelle d’Ausone.

Le chateau Ausone
Le vignoble de Château Ausone

Bazas, une cité importante au moyen-âge

La ville antique de Vasats est située sur un promontoire rocheux. Plus tard, au moyen-âge, une nouvelle ville se développe au pied de la ville antique. La jonction entre les deux villes laisse une gigantesque place où se tiennent foires et marchés.

Autour de la place, des embans [couverts] sont construits à partir du XVIe siècle. Là, on peut voir de magnifiques hôtels particuliers des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles, ainsi que le Présidial (tribunal).

Les embans de Bazas
Les embans de Bazas

De même, la ville conserve une partie des remparts du XIIIe siècle dont la porte du Gisquet, ou la poterne de la Brèche.

L’hôpital Saint-Antoine, ancien hospice sur le chemin de Saint Jacques, est transformé en hôpital au XVIe siècle. Il renferme une pharmacie du XVIIIe siècle qui comporte une impressionnante collection de faïences et de verreries de Bazas.

Pendant la guerre de Cent ans, Bazas change plusieurs fois de maitre. En 1347, les Anglais l’assiègent, puis, en 1370, les Français. De même, les Albret, alliés des Anglais, cherchent à mettre la main sur la ville. Mais elle redevient française en 1441.

Bazas, cité épiscopale

Vasats est une cité épiscopale jusqu’en 1789. Grégoire de Tours (VIe siècle) raconte qu’une dame de Bazas aurait rapporté de Jérusalem un flacon de sang de Saint-Jean-Baptiste provenant de son exécution. Par conséquent, Saint Jean-Baptiste est le patron de la cathédrale romane. Les Normands la saccagent en 853.

La construction de la cathédrale gothique, édifiée sur l’emplacement de l’église romane, commence en 1233 et ne se terminée qu’en 1537. De plus, les Huguenots la saccagent en 1561 puis la détruisent en 1577 et 1578. Heureusement, les habitants de Bazas paient une rançon de 10 000 écus et préservent ainsi sa façade. Ensuite, la cathédrale est reconstruite entre 1583 et 1635. Elle est classée au titre des Monuments historiques en 1840 et inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO au titre des chemins de Saint-Jacques de Compostelle en 1998. Si la cathédrale abrite depuis longtemps un orgue, le dernier est absolument magnifique avec ses couleurs bleu turquoise et or.

Les orgues de la cathédrale de Bazas
Les orgues de la cathédrale de Bazas

Bazas, berceau de la race Bazadaise

La Bazadaise

La Bazadaise se reconnait à sa robe gris ardoise. Ses cornes sont en forme de croissant vers le bas. Elle mesure 1,40 m au garrot et pèse près de 750 kg. Utilisée pour le débardage en forêt, elle a failli disparaitre à cause de la mécanisation. Ses qualités bouchères l’ont sauvée.

La Bazadaise est rustique, vêle facilement et s’adapte à un milieu sec et chaud. Elle bénéfice d’une IGP (indication géographique protégée) depuis 2008. Elle est élevée sous la mère puis nourrie dans les pâturages. On l’engraisse ensuite au grain à l’étable avant de l’abattre à minimum 36 mois.

La passejada deus bueus gras de Vasats

Tous les 24 juin, tous les jeudis avant Mardi-gras et tous les 24 juin à l’occasion de la fête de Saint-Jean de Bazas, on célèbre la Bazadaise.

D’ailleurs, la passejada deus buèus de Vasats remonterait au moyen-âge. Edouard Ier d’Angleterre aurait autorisé l’évêché à recevoir un taureau chaque année comme présent des habitants de Bazas. ors de leur remise, on les faisait défiler dans la ville.

La passejada deus bueus gras de Vasats
La passejada deus bueus gras de Vasats

C’est l’origine de la passejada qui est devenue, avec le temps, une foire agricole très courue. C’est aussi une journée de promotion de l’IGP Bœuf de Bazas.

Ainsi, la passejada commence par la pesée des bœufs. Ils défilent ensuite dans les rues de Bazas, les cornes ornées de fleurs, au milieu de chars décorés et de musiciens. Pendant le défilé, une ripataulèra, fifres et tambours, donnent une aubade devant chaque boucherie de la ville. L’arrivée de la cathédrale marque le début du concours des bœufs. Un banquet conclut la passejada.

Serge Clos-Versaille

écrit en orthographe nouvelle

Références

Ausone, Ordo urbium nobilium, XIV
Le cento nuptialis d’Ausone : Virgile descendu de son piédestal, Camille Bonnan-Garçon, 2014
Bazas, histoire et patrimoine
Hèsta deus bueus gras, PCI, CIRDOC, Christine Escarmant-Pauvert
Wikipédia