Les plus petites communes des Pyrénées

Village d'Ourdon (Hautes-Pyrénées)
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La France compte 36 697 communes. C’est le chiffre le plus important de tous les pays d’Europe. Certaines sont toutes toutes petites.  Allons respirer le bon air à la découverte de ces lieux en Gascogne.

Caubous, commune de 4 habitants

Commune de Caubós (31) - Eglise Saint Félix
Caubós (31) – Eglise Saint Félix

Caubós en gascon, Caubous est tout près de Bagnères de Luchon (Banhèras de Luishon en gascon), à 9 km dans la vallée d’Oueil (vath de Guelh). C’est la commune la moins peuplée de la Haute-Garonne avec ses 4 habitants. Depuis deux siècles, sa population n’a que rarement dépassé les 80 habitants. Pourtant, en regardant son église gothique, Sent Feliç de Caubós, avec son clocher-mur à deux baies et sa porte du XVIe, on imagine que le village a dû être plus important.

Pourquoi cette église est-elle dédiée à Sent-Feliç ? Dans le « Dictionnaire des communes » de Jean-Baptiste Gindre de Mancy (1797-1872), dix-sept communes françaises portent ce nom, dont treize en pays d’oc. Peut-être s’agit-il de ce Sent Feliç, évêque martyr de Girona, en Catalogne, au IIIe siècle, dont l’aura s’est étendue dans nos régions. L’empereur romain Diocletianus (244-311?) parle de lui : Parva Felicis decus exhibebit artubus sanctis locuples Gerunda [La petite Gérone, riche en saintes reliques montrera la gloire de Félix].

Une promenade pour les curistes de Luishon

Ernest Lambron - Les Pyrénées et les eaux thermales sulfurées de Bagnères-de-Luchon
Ernest Lambron – Les Pyrénées et les eaux thermales sulfurées de Bagnères-de-Luchon

Le docteur Ernest Lambron (1815-1882) s’intéresse à la santé des baigneurs des thermes de Luishon et aussi à leurs loisirs. Ainsi, il décrit tous les lieux de promenade à l’entour dans un de ses livres, Les Pyrénées et les eaux thermales sulfurées de Bagnères-de-Luchon. La commune de Caubós y est citée. En particulier, il y signale un sarcophage roman qui sert d’auge pour faire boire les chevaux.

Il faut, selon le docteur Lambron, 3 h à pied pour y aller et 2h 10 pour en revenir. Et c’est l’occasion d’admirer la vath de Guelh, relativement étroite, ses 700 ha de forêts et ses pelouses d’estives. Caubós s’y étage de 1900 à 1200 m d’altitude. Les amoureux de la nature y verront quelques jolies fleurs comme le « tabouret des montagnes » ou l’odorante « aspérule des Pyrénées ».

La Vallée d'Oueil
La vath de Guelh – la vallée d’Oueil

L’eau à Caubós

Presque toutes les communes de France proposent un réseau et des compteurs individuels pour délivrer l’eau potable. Caubós, elle, a gardé son ancien système : une source et un astucieux dispositif de vases communicants.

En revanche, il y a environ dix ans, le ministère de l’environnement a décidé de démanteler la centrale hydroélectrique de Caubous qui datait de 1904. Certes, l’échelle à poissons était à refaire mais certains se sont désolés de détruire un outil de production d’énergie renouvelable et une ressource économique pour les collectivités.

Baren, commune de 12 habitants

Eglise Saint-Pierre aux Liens de la commune de Baren (31)
Baren (31) – Eglise Saint-Pierre aux Liens

Si Baren n’a eu que 5 habitants, le village en compte aujourd’hui 12. Lui aussi se situe peu loin de Luishon. Avec ses 880 m d’altitude, il bénéficie du soleil quand la vallée est déjà dans l’ombre.

Le nom, Baren, pourrait venir du gascon barén, ravin, précipice, sol d’un marais desséché, que l’on peut rapprocher de barranca, selon le Französisches Etymologisches Wörterbuch (FEW).

Barén a beaucoup de charme, surtout grâce à la réhabilitation des granges, effectuée en très grosse partie par les particuliers eux-mêmes. Le village a une petite église, Sent Pèir deus ligams (Saint Pierre aux liens), munie d’un clocher-mur à deux baies. Le nom rappelle la basilique de Rome, San Pietro in Vincoli, construite au Ve siècle pour conserver les chaines qui avaient enchainé saint Pierre à Jérusalem.

Ce nom a bien séduit nos ancêtres car, sur les dix-huit églises qui portent ce nom en France, on en compte quinze dans la Gascogne et le Languedoc. En Gascogne, elles sont situées à Aragnouet (65), Aragnouet-Fabian (65), Aurignac (31), Baren (31), Betbezer-d’Armagnac (40), Courties (32), Mondonville (31).

Se promener autour de la commune de Baren

Royo et Perdiguère
Royo et Perdiguère

Baren peut être un point de départ de promenade. Et, si vous cherchez un endroit tranquille pour loger, pourquoi ne pas essayer son gite, la Boulotte, très confortable ?

Tout ce coin est sous protection environnementale et les randonnées sont agréables. Par exemple, vous pouvez rejoindre le pic Burat (2154 m). Ou encore, depuis le lavoir, en direction de l’église, entamer une jolie randonnée d’environ 5 h qui vous hissera jusqu’au malh de la Pica (1747 m). Si ce n’est pas très haut, attendez-vous à une superbe vue sur les grands pics du Luchonnais et de la Maladeta. En particulier, vous pourrez admirer le Perdiguèra [Perdiguère], en fredonnant la chanson de Nadau, lo Saussat.

Tota era calhavèra,
Deth som deth Perdiguèra,
Devara ath Portilhon,
Qu’enteni sa cançon,
Jo sus era montanha,
Non n’ei cap de companha,
Eth còr tot enclavat,
Que uèiti eth Saussat.
Tous les cailloux,
Depuis le sommet du Perdiguère
Descendent au Portillon,
J’entends leur chanson,
Et moi sur la montagne,
Je n’ai pas de compagne,
Le coeur tout serré,
Je regarde le Saussat.

Ourdon 9 habitants

Les Hautes-Pyrénées ont aussi une jolie petite commune, Ourdon. Entre Gazost et Agos-Vidalos, elle s’étend entre 560 et 1400 m d’altitude. La moitié des logements sont des habitations secondaires.

Si vous consultez le Dictionnaire toponymique des communes des Hautes-Pyrénées de Michel Grosclaude et Jean-François Le Nail, vous découvrirez l’évolution de la dénomination du village. Appelé d’Ordo en 1313 dans le Debita regi Navarre (livre des droits de Navarre), il prend aussi le nom d’Ordonum, dans ce même Debita regi. Ou encore, en 1342, De Ordano dans le pouillé (dénombrement des bénéfices ecclésiastiques d’un domaine géographique) de Tarbes.

L’écriture du nom va se stabiliser, passant par Ordoo en 1384 dans le livre vert de Bénac, Ordo en 1403 puis devient Ordon au XVIIIe siècle (registres paroissiaux, carte de Cassini). Notez que le o se prononce « ou ».

Et si vous êtes en jambes, pourquoi ne pas monter au soum de Trézères (1610 m) à pied ou en vélo ?

Soum de Trézères
Soum de Trézères

Senconac, commune languedocienne de 13 habitants

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Senconac est la commune la moins peuplée du département de l’Ariège, et située dans la vallée de Haute Ariège, en amont de Tarascon. Elle n’est pas en Gascogne mais cette pyrénéenne a eu, au cours du temps, des liens avec elle : Bernard Roger, premier comte de Foix (981 ?- 1036 ?) possède le Couserans, Foix, le Sabartès, et la Bigorre par mariage avec Garsende.

Lorsque Roger II, comte de Foix, la donne à l’abbaye de Cluny en 1074, elle est appelée Villam Succunacum. Plus tard, un successeur, Roger-Bernard III de Foix, (fin XIIIe), en bisbille avec le roi de France, prétend que Senconaco appartient toujours à son comté…

Le village a parfois été appelé Sent Conac [Saint Conac].  Il est vrai que l’on trouve dans plusieurs endroits le nom de Conac ou Cosnac, du gaulois Condate, mettant en avant la confluence de plusieurs cours d’eau. En tous cas, trois ruisseaux passent par Senconac.

La commune a perdu son église Senta Maria il y a déjà pas mal de temps, mais sa visite reste agréable. En particulier, située à plus de 900 m d’altitude, on peut admirer la vue sur la vallée. Les plus courageux pourront se promener à l’étang d’Appy, au aller en cheminant sur les crêtes, jusqu’au pic de Galinat (2115 m).

L'étang d'Appy
L’étang d’Appy

Comment former une équipe municipale dans de si petits villages ?

Les communes entre 0 et 99 habitants ont droit à sept élus au conseil municipal. Pas si simple pour ces communes ! D’ailleurs, que se passerait-il s’ils ne pouvaient rassembler cette équipe ? Baren, en 2020, a réussi à élire six conseillers (sur six votants) et fait un procès-verbal de carence pour le septième membre. Caubous n’a pu présenter que cinq candidats. Heureusement, car en-dessous de cinq, « On nous rattacherait à une autre commune« , précise le maire de Caubous.

Anne-Pierre Darrées

écrit en orthographe nouvelle

Références

Les Pyrénées et les eaux thermales sulfurées de Bagnères-de-Luchon, Dr Ernest Lambron, 1860
Dictionnaire des communes, Jean-Baptiste Gindre de Mancy, 1897
Vallée d’Oueil et soulane du Larboust, INPN
Französisches Etymologisches Wörterbuch (FEW), Walter von Wartburg, dictionnaire étymologique et historique du gallo-roman (français et dialectes d’oïl, francoprovençal, occitan, gascon), ATILF

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2 réflexions sur “Les plus petites communes des Pyrénées

  1. BanhèrEs. Et Caubous c’est déjà du gascon tout autant que Caubós, c’est juste écrit différemment.

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