Les Mansonniens (habitants de Maisons-Laffitte) doivent le nom de leur commune à Jacques Laffitte, banquier et homme politique français qui a pris une part importante dans la Révolution de 1830. Ce que l’on sait moins, c’est que Jacques Laffitte est un Gascon de Baiona (Bayonne).
A 21 ans, Jacques Laffitte quitte le pays

Jacques Laffitte (1767-1844) nait à Bayonne. Son père Pierre est maitre charpentier. Sa mère s’appelle Etiennette Rogère. La famille est modeste et nombreuse (10 enfants). Jacques fait peu d’études et devient apprenti charpentier chez son père, puis clerc chez un notaire et enfin commis chez un négociant.
En 1788, il a 21 ans. Le voilà qui « monte à Paris » muni d’une lettre de recommandation de son patron pour solliciter un emploi de commis dans les bureaux de la banque Perregaux. Rapidement, il gravit tous les échelons jusqu’à devenir associé de la banque qui s’appelle désormais Perregaux Laffitte et Cie.
De la charpente à la banque
Cependant, en janvier 1800, Napoléon Bonaparte crée la Banque de France sur la proposition de Jean-Frédéric Perregaux. Celui-ci en est le régent (administrateur) et installe son siège dans l’hôtel de Toulouse, rue de la Vrillière, en plein cœur de Paris. À sa mort, en 1808, c’est Jacques Laffitte qui prend cette fonction. Et il la gardera jusqu’en 1821.
En même temps, il devient juge au Tribunal de commerce de la Seine et Président de la Chambre de commerce. Napoléon lui aurait dit : « Je vous connais Monsieur Laffitte, je sais que vous n’aimez pas mon gouvernement, mais je vous tiens pour un honnête homme ».
En tous cas, à la chute de l’Empire, il est nommé Gouverneur de la Banque de France. Il souscrit sur ses fonds personnels une somme couvrant la contribution de guerre exigée par les Alliés. Après Waterloo, il s’oppose à ce que la Banque de France paie les arriérés de solde des soldats de l’Armée impériale et avance la somme nécessaire sur ses fonds propres. De plus, il avance la nouvelle contribution de guerre exigée par la Prusse. Et il évite une crise financière en achetant sur ses fonds des rentes qu’il paye.
En fait, Jacques Laffitte a une fortune considérable. D’ailleurs, il achète le château de Maisons (futur Maisons-Laffitte), le château de Meudon, le château de Breteuil-sur-Iton et un hôtel particulier à Paris.
De la banque à la politique
L’homme est très actif. Le 8 mai 1815, Jacques Laffitte est élu représentant du commerce à la Chambre. Puis réélu député de la Seine en 1816. Et il se spécialise dans les affaires financières. Sans oublier son pays, en 1827, il devient député de la circonscription de Bayonne.
Il prend une part active aux émeutes de 1830. Il transforme son hôtel particulier en quartier général de l’insurrection. Là, les députés constituent une commission municipale.


Ainsi, il est l’un des principaux artisans de la proclamation de Louis-Philippe, surnommé roi des Français (et non roi de France). Le 9 aout, il préside la Chambre devant laquelle Louis-Philippe prête serment. Alors, Jacques Laffitte est nommé Président du Conseil et forme le Gouvernement. Il est en même temps ministre des finances.
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Mais, le climat politique est tendu. Le procès des ministres de Charles X provoque une émeute. Plusieurs lois sont décidées sans son accord : loi conférant au roi la nomination des municipalités, loi sur la presse, etc.
Perfidement, le roi lui dit : « Il n’y a qu’une chose impossible entre nous, c’est que nous ne soyons pas toujours ensemble ». Pourtant, en coulisses, il cherche à se débarrasser de Jacques Laffitte. L’intervention de l’Autriche en Italie lui en fournit l’occasion. Le roi interdit d’informer Jacques Laffitte de l’intervention militaire. Et celui-ci l’apprend en lisant le journal ! Jacques Laffitte présente en Conseil des ministres son plan d’intervention pour aider les insurgés italiens mais il est repoussé. Le roi a bien préparé le terrain. Aussi, Jacques Laffitte démissionne le 13 mars 1831.
Déçu, Jacques Laffitte retourne à la Chambre des Députés et devient un farouche opposant à la Monarchie de Juillet et à Louis-Philippe.
De la gloire à la ruine

La politique entraine des dépenses importantes. De plus, sa banque prête à des industriels qui font faillite et qui ne remboursent pas. La situation devient critique. Il vend la forêt de Breteuil.
Lorsqu’il quitte le gouvernement, Jacques Laffitte est quasiment ruiné. Il doit liquider sa banque en 1831. Ses adversaires politiques l’appellent « Jacques La Faillite ».
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De fait, Jacques Laffitte vend son hôtel particulier de Paris et une partie de son domaine de Maisons. Toutefois, il garde le sens des affaires : sur le modèle des lotissements paysagers anglais, il crée une ville composée de maisons de campagne que les parisiens fortunés s’arrachent. Jacques Laffitte crée aussi les premières courses de chevaux. Et la ville de Maisons-sur-Seine prend le nom de Maisons-Laffitte en 1822.
Sa liquidation est terminée en 1836. Il fonde la Caisse Générale du Commerce et de l’Industrie, banque d’affaires destinée à financer les entreprises industrielles. Il en confie la direction à son frère Martin qui a fait carrière comme armateur à Rouen. La banque disparaitra à la mort de Jacques Laffitte. Plus de 20 000 personnes assistent à ses obsèques. Il repose au cimetière du Père Lachaise.
La famille de Jacques Laffitte

Jacques Lafitte se marie en 1801 avec Marine Françoise Laeut, fille d’un négociant et capitaine de navire. Il a une fille unique qu’il marie à Joseph-Napoléon Ney, le fils du Maréchal Ney.
Un contemporain parisien, Charles comte de Rémusat dira de Jacques Laffitte : « S’il rappelle Necker par sa formation, son optimisme inébranlable et son ivresse de la popularité, Laffitte n’en a pas le recul et l’intelligence ».
Un long poème de dix pages, publié en 1845 sur la vie de Jacques Laffitte portera ces vers :
Pleurez, pleurez, vous tous, vous qui, dans la misère,
Avez reçu les dons de sa main tutélaire.
Pleure, pauvre peuple, maudis les coups du sort,
Tu as perdu ton père, Jacques Laffitte est mort !
Références
Wikipédia.
18 janvier 1800, naissance de la Banque de France, André Larané, 2020.
Napoléon.org, Laffitte Jacques, Marc Allégret, 2002.
Jacques Laffitte, poème de P.M. André, 1845. www.gallica.fr