Le château de Mauvezin, lo castèth de Mauvesin, dans toute sa splendeur retrouvée du XIVe siècle, domine les Baronnies, la vallée de l’Arros et l’abbaye de l’Escaladieu. Quelle est donc son histoire ? Albin Bibal, membre de l’Escòla Gaston Febus, qui acheta puis donna le château à l’Escòla, raconte.
Les premières traces
Le château de Mauvezin a probablement été construit au XIe siècle. Enfin quand on dit château… il s’agissait, à l’époque, d’une tour en bois de 3 m de haut, ua toròta, entourée de palissades en bois, construite sur une hauteur que l’on appelait mòta, motte. Pourquoi le lieu a-t-il été appelé Mauvesin, mau vesin, mauvais voisin ? On ne sait…
On attribue à Centolh 1er, Centulle 1er, la construction de ce casterar.
En 1133, les grands de Bigorre se réunissent à Mauvezin pour borner le comté avec celui de Labarthe. Les seigneurs sont alors Beatrix II de Bigorre et Pierre de Marsan son époux. Ce sont eux qui favorisent l’installation de l’abbaye de l’Escaladieu, au pied du château de Mauvezin.
De maison en maison
En 200 ans, la Bigorre passe par plusieurs maisons seigneuriales, au gré des mariages et des cessions, au rythme d’un changement tous les 50 ans environ : Bigorre, Foix, Béarn, Marsan, Comminges. Cela va s’accélérer avec Pétronille de Comminges (1186-1251), la petite fille de Centolh III, célèbre pour ses cinq maris. Elle passera le flambeau, pour quatre ans à la maison de Montfort, à l’occasion de son troisième mariage avec Guy de Montfort, le fils de Simon, celui qui se fit remarquer dans la guerre des Albigeois. Puis maison du Chabanais, de nouveau Béarn… Même le roi de Navarre récupèrera ces terres en 1265. À se demander si les paysans avaient le temps de savoir qui étaient leurs seigneurs !
Le 8 mai 1360, par le traité de Brétigny entre le roi de France et le roi d’Angleterre, le comté de Bigorre et notre château de Mauvezin reviennent au roi d’Angleterre. Le duc d’Anjou, pourtant fils du roi de France, et lieutenant-général en Languedoc, s’en moque. Il assiège les Anglais à Mauvezin, reprend le château et le donne à Jean 1er d’Armagnac. Gaston Febus ne l’entend pas de cette oreille. Alors, il part en guerre contre son voisin.
Gaston Febus prend possession du château de Mauvezin
Enfin le 20 mars 1379, le traité d’Orthez, rédigé en gascon par Pey de Mayres, notari reyau, met fin au différend entre les deux seigneurs.

Le traité comprend six items. Le premier est le mariage de Beatrix d’Armagnac (fille de Jean) et du jeune Gaston de Foix (fils de Febus) pour garantir la pérennité des accords. Avec le deuxième, Armagnac cède la tour de Couffoulens et le reste de la terre d’Albigeois au comte de Foix. Il lui accorde dans le troisième, l’usufruit du lieu et de la Châtellenie de Saint-Julien et lui attribue (quatrième item) à perpétuité, Mauvezin et Godor : item, la begarie de Maubesin & de Godor demoren ab lodit monsenhor de Foix à perpetualitat, per si e per sos.
En revanche, cinquième item, Febus et sa lignée renoncent à toutes prétentions sur le comté de Comminges. Le traité se conclue par l’échange réciproque de prisonniers (sixième item).
Afin d’assurer l’application de ce traité, il est bien précisé que les seigneurs ont juré serment sur le corps de Jésus Christ, devant Monseigneur Beguer, évêque de Lectoure, avec toutes les conséquences s’ils venaient à le rompre :
… & en cas que en res hi faillissen volen aver renegat Diu, loquau los fossa contra & à dampnacion de lors corps e de lors ammes, preneon lo diable per senhor & eslegin los soboltures en enfern, are per labets & labets per are ; ...
Qu’ils se le tiennent pour dit !
Gaston Febus donne au château de Mauvezin sa splendeur

Gaston Febus fait édifier de vraies forteresses pour défendre tout son territoire d’Orthez à Foix. Travaux qu’il confie à l’architecte languedocien Sicard de Lordat. Mauvezin sera une de ces forteresses. L’architecte transforme la tour en pierre (que l’on voit toujours dans la cour intérieure), ajoute un donjon de 37 m, fait rehausser les remparts. Bref, le château médiéval de Mauvezin est prêt pour de nouvelles aventures. De casterar, le château devient casteràs.
Et, si le cœur vous en dit, vous pouvez aujourd’hui l’admirer, le visiter, participer aux fêtes médiévales de la dimenjada du 15 août. Il a été restauré pour s’approcher au mieux de ce que Febus en avait fait.
Anne-Pierre Darrées
Références
Histoire chronologique du vieux château-fort de Mauvezin et ses destinées, Albin Bibal, 1913.
Histoire générale de Languedoc Avec des Notes & les Piéces justificatives, tome quatrième, 1742, p. 354 – 357, textes rassemblés par un religieux bénédictin de la congrégation de Saint Maur.
Cette belle description historique sera publiée dans la Lettre des Amis du lac de jeudi prochain !
Il n’y a pas que la mer dans notre région !!!