Les constructions anciennes utilisent les matériaux disponibles sur place. Ainsi, on emploie la pierre en montagne, le galet roulé dans la plaine de l’Adour et des Gaves. Le centre de la Gascogne, dépourvu de carrières de pierres ou de galets, adopte traditionnellement la terre.
Les techniques de construction en terre traditionnelles

Il existe quatre techniques de construction en terre.
Le pisé consiste à compacter un mélange d’argile, de sable, de gravier et de fibres naturelles (paille, foin, etc.). Etalé en fine couche dans un coffrage, il est ensuite compacté à l’aide d’un pilon (prononcer : pilou). Cette technique est très utilisée entre le XVIIIe et le XXe siècle. On la rencontre surtout au nord du Béarn et de la Bigorre, en Astarac (environs de Mirande) et en Magnoac. Les murs sont très épais et généralement dépourvus d’ouvertures. Les murs en pisé ont une forte inertie (capacité d’emmagasiner et de restituer la chaleur de manière diffuse). On s’en servait pour la construction de caves ou de fours.

La bauge est un empilement de boules de terre malléables qui sont ensuite battues et taillées. Cette technique nécessite peu d’outillage. Il n’y a pas besoin de coffrage ou de moule, seulement un outil tranchant pour lisser les parois. Les murs sont très épais.

L’adobe est une brique de terre crue moulée et séchée au soleil. Elle est courante dans la région toulousaine. En Astarac et dans le Magnoac, on rencontre souvent des constructions en damier alternant adobes et galets.
Enfin, le torchis est une couche de terre, mélangée à de la paille, étalée sur un lattis de bois de chêne ou de châtaignier. Un enduit est ensuite passé sur la terre sèche. Cette technique est prépondérante en Armagnac. La technique est apparue dans les Landes au XVe siècle et a été très utilisée jusqu’au XVIIe siècle. Elle permet la construction d’étages. Les maisons du centre d’Auch, de Marciac ou de Tillac sont construites en torchis.
La terre, un matériau écologique et moderne

On redécouvre que nos anciens étaient écologistes avant l’heure. En effet, la terre est un matériau naturel, entièrement recyclable, qui possède des qualités thermiques et hygrométriques particulièrement adaptées pour l’habitat.
De plus, on extrait la terre localement, ce qui réduit les couts d’extraction, de transformation et de transport qui pèsent sur le bilan carbone et l’empreinte écologique des constructions. Elle ne nécessite peu d’outils.
La terre est un matériau de construction sain qui ne nuit pas à la santé des habitants car il ne dégage aucune émanation toxique ou cancérigène. Elle amène un confort intérieur par l’apport d’inertie et la régulation de l’hygrométrie.

Précisons que l’inertie est la capacité d’un matériau à emmagasiner et à restituer la chaleur de manière diffuse, ce qui permet d’obtenir un déphasage thermique dans le temps par rapport aux températures extérieures. Associée à une bonne isolation, elle permet d’optimiser le confort d’été comme d’hiver.
Quant à l’hygrométrie, elle caractérise la quantité d’eau sous forme gazeuse présente dans l’air humide. Un mur en terre régule l’humidité ambiante en absorbant et en restituant naturellement la vapeur d’eau (respiration, salle de bain, cuisine).
La terre est un bon isolant qui apporte un confort acoustique entre deux pièces.
Enfin, il existe une grande diversité de terres qui offrent une palette de textures et de couleurs qui s’adaptent à tous les intérieurs et aux gouts de chacun.
Entretenir les constructions de terre anciennes
Beaucoup de constructions de terre ne sont pas entretenues. Les techniques sont oubliées et les propriétaires se trouvent souvent désemparés. Cela explique la disparition rapide de cet héritage.

Pourtant, un entretien régulier permet de conserver le bâti en terre pendant plusieurs siècles. C’est le cas des églises romanes de Magnan ou de Saint-Michel en Astarac.
Les signes d’une dégradation sont l’érosion de la tête de murs, l’apparition de sillons horizontaux le long du mur, des remontées capillaires depuis la base du mur, la présence de mousse, lichen ou champignons sur les murs, l’apparition de fissures verticales, l’éclatement ou le décollement de l’enduit qui sert de revêtement, une partie de mur abimée voire effondrée, l’écartement de deux pans de murs dans les angles.
Ces dégradations sont parfois dues aux intempéries, mais surtout à nos modes de vie moderne. Ce sont des habitudes ou des modes qui empêchent les murs de terre de respirer.

La construction de surfaces étanches aux abords des maisons de terre (trottoirs en ciment, sol goudronné, …) et la pose de revêtements intérieurs ou extérieurs étanches (dalles en ciment, carrelage, bâche de plastique, …), empêchent l’humidité du sol de s’évacuer naturellement et provoquent des dégâts à terme.
Des extensions accolées aux constructions de terre peuvent créer des désordres par suite d’une mauvaise jonction des toitures. De même, la création d’une ouverture trop près d’un angle peut fragiliser un mur.
Construire en terre aujourd’hui
On considère la terre comme un matériau « non noble » et les constructions modernes ne l’utilisaient plus. La réglementation technique favorise l’utilisation de matériaux industrialisés et rapides à mettre en œuvre. Toutefois, le développement durable s’impose. La terre est un matériau naturel, économique, recyclable, local et disponible. Son utilisation permet de valoriser des filières courtes.

Des collectivités favorisent le renouveau de la terre pour rénover le patrimoine bâti et dans les nouvelles constructions. Le Parc naturel régional d’Astarac en a fait un des axes de son développement.
Déjà, en 1981, le Centre Georges Pompidou présentait une exposition sur le thème : « Des architectures de terre ou l’avenir d’une tradition millénaire » pour promouvoir l’emploi de la terre crue dans la construction. « Il s’agit d’abord de redécouvrir et de comprendre les témoignages, […] ; […] et surtout, de déployer des politiques d’actions qui globalement visent à réactualiser et à moderniser, à rationaliser et à promouvoir divers usages nouveaux de ce mode de construction ».

Quarante ans plus tard, des filières se sont organisées. Des architectes et des entrepreneurs proposent une large gamme de compétences dans l’utilisation des différentes techniques de constructions en terre. La Gascogne est devenue un des pôles principaux de développement lié à une forte tradition de constructions en terre et à un important patrimoine local.
De nouvelles techniques apparaissent comme le « terre-paille » dérivé du torchis ou les briques de terre comprimées, sorte d’adobes mécanisés. On a utilisé ces techniques de construction pour la construction de l’école de Saint-Germé ou pour le siège d’Ecocert à l’Isle Jourdain.
Pour en savoir plus, lisez L’architecture de terre crue en Gascogne, Pistes pour sa revalorisation et son emploi contemporain,.
Serge Clos-Versaille
écrit en orthographe nouvelle
Références
Wikipédia
L’architecture de terre crue en Gascogne, Pistes pour sa revalorisation et son emploi contemporain, Ecocentre Pierre&Terre
Guide architectural « L’architecture de terre en Midi-Pyrénées, pistes pour sa revalorisation », Anaïs Chesneau, Ecocentre Pierre & Terre.