Comment poursuivre le Canal du Midi au-delà de Toulouse pour rejoindre l’Océan Atlantique ? Les premières études de Louis Galabert portaient sur un canal qui relierait, depuis Toulouse, le canal du Midi au port de Bayonne. Son cout exorbitant lui fait préférer le canal de Garonne qui relie Toulouse à Bordeaux.
Qui est Louis Galabert ?

Louis Galabert (1773-1841) nait à Castelnaudary. Son père est négociant, le voilà destiné aux affaires.
À 16 ans, il s’embarque pour Saint-Domingue et échappe de peu au massacre de la révolte des esclaves. En 1792, on l’arrête et on l’emprisonne à Paris comme « suspect »; il s’évade. Il s’engage à Lille au 13ème chasseur à cheval. Hélas, dénoncé, il s’enfuit en Angleterre puis en Espagne. On le considère comme un émigré.
Alors, Louis Galabert part pour les Philippines, la Chine et le Mexique. Puis, il revient à Castelnaudary et s’engage dans l’armée impériale. Chef de bataillon, puis colonel, décoré de la Légion d’honneur, il participe à la bataille de Toulouse en 1814. Démobilisé, demi-solde, il part aux États-Unis en 1817. On le retrouve colonel dans l’armée espagnole en 1820. Enfin, il rentre en France en 1823.
Le projet de Galabert

Louis Galabert s’engage alors dans le grand projet de réaliser un canal passant par les Pyrénées et reliant l’Atlantique à la Méditerranée.
Le projet n’est pas nouveau puisqu’il apparait la première fois en 1785, revient en 1808, est présenté à l’Empereur puis abandonné. Louis Galabert reprend le projet, il propose de le financer entièrement à ses frais. Il a le soutien de la Chambre de commerce de Toulouse et de 132 maires des communes pyrénéennes qui veulent ce canal.
En 1832, Louis Galabert obtient la concession du Canal Royal des Pyrénées. Malheureusement, il est à court d’argent et les travaux ne peuvent commencer ; alors, la concession est annulée l’année suivante. Pour obtenir de l’argent, Louis Galabert propose à Louis-Philippe la création d’une ville nouvelle située à 20 km de Bayonne au confluent du futur canal des Pyrénées, du Gave de Pau, de l’Adour et de la Midouze. Il l’appelle « Ville de Louis-Philippe ». Mais le projet ne séduit pas.
Il sollicite un emprunt auprès de la Chambre de commerce de Toulouse, fonde une société par actions. C’est un nouvel échec. Louis Galabert est désespéré, il meurt en 1841.
Toutefois, ses plans serviront pour le tracé de la ligne de chemin de fer entre Toulouse et Bayonne.
L’idée de Louis Galabert
Le canal des Pyrénées devait partir de Toulouse, remonter la Garonne par Saint-Gaudens et Montréjeau. Arrivé à Izaux sur la Neste, il devait franchir le point de partage des eaux en souterrain jusqu’à Avezac, descendre ensuite l’Arros en rive droite, puis l’Adour jusqu’au Bec des Gaves où l’Adour devient navigable jusqu’à Bayonne.
Louis Galabert, n’a aucun doute sur la rentabilité du canal des Pyrénées. Les péages, quel qu’en soit le montant, ne dissuaderont pas les armateurs qui doivent faire le tour de l’Espagne par le détroit de Gibraltar avec tous les dangers que cela comporte. L’irrigation permise par le canal augmenterait la production de grains qui seraient ensuite transportés sur le canal. De même, le transport par bateau sur le canal faciliterait l’exploitation du bois, des ardoisières et du marbre de la vallée d’Aure. Bref, un énorme bénéfice à la clé.
Le canal des Pyrénées doit aussi permettre l’envoi des troupes sur la frontière espagnole et leur ravitaillement.

Le projet de Louis Galabert
Le canal des Pyrénées doit avoir 22 mètres de large et 3 de profondeur. Il nécessite la construction de 274 écluses pour un trajet de 23 heures de Toulouse à Bayonne. L’ouvrage est alimenté par la Neste. Finalement, une partie de ses eaux sera dérivée dans le canal de la Neste qui alimente les rivières du Gers.

Le cout de construction du canal des Pyrénées serait de 30 Millions de Francs. Un peu moins que ce qui avait été présenté au roi en 1820.
À raison de 80 centimes du kilomètre, Louis Galabert estime que le péage pour le transport des marchandises se monterait à plus de 5 Millions de Francs chaque année. Avec le transport et l’approvisionnement des troupes en temps de guerre, le revenu grimperait à 7 Millions de Francs.
Avec le projet du canal des Landes entre Lavardac et Mont de Marsan et le projet du canal de la grande Lande qui relie les étangs des Landes entre Bordeaux et Peyrehorade, le projet de canal des Pyrénées doterait la Gascogne d’un réseau de voies navigables.
L’échec du projet de Canal des Pyrénées
S’il est vrai que 132 communes des Pyrénées et les départements de la Haute-Garonne, du Gers, des Hautes-Pyrénées, des Basses-Pyrénées et des Landes soutiennent le projet du canal des Pyrénées, il a aussi beaucoup de détracteurs du côté de la Garonne.
Pourtant, Louis Galabert pense avoir gagné la partie face au projet concurrent du canal de la Garonne. Le concessionnaire connait de graves difficultés financières et les travaux prennent du retard. Mais lorsque l’État reprend à son compte le projet de Canal de Garonne, c’en est fini des espoirs de Louis Galabert.
Le Journal politique et littéraire de Toulouse et de la Haute Garonne, dans son numéro du 9 janvier 1840 met en avant les arguments qui s’opposent à la construction du Canal des Pyrénées et les contre-arguments de Louis Galabert.
En premier lieu, le canal a une longueur de 340 km, contre seulement 190 km pour celui de Garonne. La chute d’eau à rattraper par des écluses est de 967 mètres contre à peine 125 mètres pour le canal de Garonne.
En second lieu, les études de Galabert minorent les couts de la construction. Le seul cout du canal souterrain sous le plateau de Lannemezan rend le projet économiquement irréalisable.
Enfin, le temps de trajet est inférieur par le canal de Garonne et on voit mal un bateau payer plus cher un péage pour le transport des marchandises. Enfin, Bordeaux est un grand port de marchandises. Sans le dire, on comprend bien que Bayonne ne tient pas la comparaison…

Serge Clos-Versaille
écrit en orthographe nouvelle
Références
Wikipédia
Louis Galabert, Canal royal des Pyrénées, 1827, www.gallica.fr
La vie aventureuse de Louis Galabert, Robert Tauriac et Louis Audebaud, L’Auta, février 2009.
Le projet non réalisé de Louis Galabert, canaldumidi.com
Lettre de la Ligue du Canal Royal des Pyrénées