Les calhavaris ou charivaris sont des manifestations bruyantes que les jeunes organisent pour donner une sérénade nocturne aux couples remariés ou aux amics de coishinèra (amants). On porte ainsi à la connaissance de tous les écarts à la morale. Ils donnent lieu parfois à des débordements et à des troubles à l’ordre public.
Quand donne-t-on un calhavari ?
Les motifs d’un calhavari sont nombreux : un remariage sur le tard, une grande différence d’âge entre les époux, un remariage hâtif, un mari battu par sa femme, un mari cocu, un couple sans enfants, une jeune fille qui est enceinte ou qui a éconduit un prétendant, un couple avaricieux qui évite d’inviter ses voisins, etc.

Le calhavari sert à dénoncer ceux qui ont enfreint les valeurs morales ou les coutumes de la communauté.
La nuit, ou plusieurs nuits en suivant, les « contrevenants » ont droit à un effroyable concert de tambours, de sifflets, de bruits de casseroles, d’injures, de cris et de chansons. On lance des cailloux sur la maison et parfois, on tire des coups de feu.
Ainsi les personnes qui entretiennent des relations adultères ont droit à un calhavari et parfois à une flocada. Elle consiste à semer des cailloux ou des feuilles entre les deux maisons pour faire un chemin, de préférence le samedi soir, pour que tous ceux qui se rendent à la messe du dimanche en soient les témoins.
Comment éviter le calhavari ?
Pour éviter le calhavari, le meilleur moyen est d’ouvrir sa porte et de s’acquitter d’une somme d‘argent, de bonnes bouteilles ou de victuailles selon les exigences des tapageurs.

La fixation du montant à verser provoque parfois des désaccords entre les organisateurs du calhavari. Le partage engendre des bagarres.
On peut aussi éviter le calhavari en acceptant l’asoada. Les conjoints montés sur un âne, la femme dans le bon sens et l’homme à l’envers tenant la queue de l’âne, se promènent dans le village sous les huées.
Lorsqu’ils refusent l’asoada, on les remplace par un voisin revêtu d’habits de femme, et installé à l’envers sur l’âne. Le cortège se promène dans tout le village et fait souvent halte devant la maison du mari.
Les autorités interdisent les calhavaris

Les autorités n’approuvent pas les calhavaris. Elles les jugent contraires aux bonnes mœurs et entrainant des extorsions de fonds. Des conciles frappent d’anathème ceux qui y participent.
Le Parlement de Toulouse rend des arrêts interdisant les calhavaris en 1537, en 1542, en 1551, en 1645, et en 1649. En 1762, il prend un nouvel arrêt ordonnant que ses précédents arrêts concernant les charivaris seront exécutés. Rien n’y fait.

Les autorités locales chargées de la police sont plus complaisantes. On arrête les coupables et on les condamne à des amendes et au remboursement des sommes demandées lors du calhavari.
En 1762, un calhavari a lieu à Saint-Gaudens, suite à une dispute entre un mari et sa femme. Le Procureur général ordonne aux consuls de l’empêcher. Ceux-ci font publier un règlement interdisant les attroupements mais suspendent pendant deux jours les patrouilles de police dans la ville !
Il devient une arme politique
Le charivari, sous des rites plus ou moins différents, existe dans d’autres régions de France. Au début du XIXe siècle, il devient une arme politique redoutable.

En 1830, une campagne de charivari est organisée contre les notables et les députés libéraux ralliés à la politique d’ordre de Casimir-Pierre Perier (1777-1832).
Ils ont lieu pour des récompenses honorifiques jugées imméritées, en cas de faveur faite à un proche, en cas de corruption d’électeurs ou tout simplement parce qu’un vote à l’Assemblée Nationale déplait.
En 1833, d’Argout alors ministre de l’intérieur dit que c’est une atteinte à l’indépendance des Chambres et à la liberté des votes. On interdit le charivari, cet outil de l’expression populaire directe et on pourchasse les participants.
La pratique décline dans la deuxième moitié du XIXe siècle.
Le Charivari, le journal satirique

C’est à ce moment que nait Le Charivari, le premier quotidien illustré satirique du monde, qui parait de fin 1832 à 1937. Son fondateur, le Lyonnais Charles Philipon (1800-1862) en fait un journal d’opposition républicaine à la Monarchie de Juillet.
Serge Clos-Versaille
Article en orthographe nouvelle (1990)
Références
Articles des Bulletins de la société de Borda, de l’Agenais et de la société historique et archéologique du Gers
Charivaris en Gascogne. La morale de peuple du XVIe au XIXe siècles, Christian Desplat, Bibliothèque Berger Levrault.
Le charivari politique : un rite de surveillance civique dans les années 1830, Emmanuel Fureix
Une réflexion sur “Les calhavaris ou charivaris”